Dimanche 5 avril 2015  Eglise française de Berne  Pâques 

 

Prédication   Thème :  

Résurrection, stupeur et tremblements 

Lecture :   

Matthieu 28,1‐10   

Stupeur et tremblements devant le sépulcre. Au commencement du premier jour de la  semaine, tous les signaux nous sont donnés pour que nous comprenions que ce n'est  pas une semaine comme les autres qui commence, mais que c'est bien un nouveau  commencement, le début de quelque chose que l'on peut à peine imaginer.  L'évangile de Matthieu pose un tableau très sensoriel :   – visuel : L’ange qui descend du ciel, comme l'éclair, blanc comme neige.  – acoustique et perceptif : le tremblement de terre (seismos), auquel répond le  tremblement de terreur des gardiens. C'est d'ailleurs le même mot pour le  tremblement de terre et celui des gardiens.  Et ce mot est intéressant, parce que visiblement l’évangile de Matthieu l'aime  beaucoup. Il y apparaît sept fois, soit sous la forme du mot tremblement, soit du verbe  trembler.  Les autres évangiles ne l’ont qu'une fois, et pas dans le récit du matin de Pâques.  Chez Matthieu, le mot apparaît la première fois dans le récit de la tempête apaisée.  Justement, Matthieu, au contraire des autres évangiles, n'emploie pas le mot  «bourrasques de vent» mais séismos, tremblements, secousses. Les disciples sont  littéralement secoués dans tous les sens, dans leur barque.  Curieusement, ce mot revient dans le récit des Rameaux, l'entrée triomphale de Jésus  à Jérusalem, qui marque le début de la Passion. À la fin de ce récit, on nous dit que  quand Jésus entra dans Jérusalem, toute la vie toute la ville fut secouée : «Qui est‐ ce ? »,  disait‐on, et les foules répondaient : « c'est le prophète Jésus, de Nazareth en  Galilée ». Là, ce sont les ennemis de Jésus qui sont secoués, et inquiets.  Ensuite, le mot revient dans un long discours de Jésus à ses disciples, où il parle des  signes de la fin des temps.  Et justement, il avertit que des guerres, des famines, des tremblements de terre, des  persécutions nous attendent, mais que ce n'est pas la fin, il ne faut pas démissionner,  qu'il faut au contraire tenir bon, tout particulièrement dans les temps de crise.  C'est dans ce seul passage que les autres évangiles parlent aussi de tremblement de  terre.  Puis viennent les deux passages vraiment importants. Deux moments où Matthieu, et  seulement Matthieu, nous raconte que la terre a tremblé. 

 

 

  Le premier est le plus impressionnant : C’est l’instant après que Jésus ait poussé un  grand cri et rendu son souffle.  Mt 2751Et voici que le voile du sanctuaire se déchira en deux du haut en bas ; la terre  trembla, les rochers se fendirent ; 52les tombeaux s’ouvrirent, les corps de nombreux  saints défunts ressuscitèrent : 53sortis des tombeaux, après sa résurrection, ils entrèrent  dans la ville sainte et apparurent à un grand nombre de gens. 54A la vue du  tremblement de terre et de ce qui arrivait, le centurion et ceux qui avec lui gardaient  Jésus furent saisis d’une grande crainte et dirent : «Vraiment, celui‐ci était Fils de  Dieu.»  Pour ceux qui aiment la passion selon saint Matthieu de Jean‐Sébastien Bach, cet  épisode est rendu par un récitatif particulièrement marquant, où l’orgue s’en donne à  cœur‐joie !  Puis vient notre passage, qui est comme une réponse à la mort de Jésus. Là aussi, la  terre tremble. Là aussi les soldats sont terrifiés.  Dans ces deux textes, tous sont secoués, les amis de Jésus comme ses ennemis.  Mais lors de la mort de Jésus, il n'y a pas d'interprète extérieur. Pas de voix pour  donner du sens. Juste une terreur brute. Tout qui bouge. Rien sur quoi s'appuyer, les  repères s'effacent, les morts se mélangent aux vivants. Ces tombeaux qui s'ouvrent,  ces morts qui se réveillent, cela n'a ici rien d'une bonne nouvelle… c'est au contraire  terrifiant, et le cri du centurion « vraiment, il était fils de Dieu » tient chez Matthieu  plus de la panique que la confession de foi.  On retrouve cette même panique chez les soldats qui gardent le tombeau, au matin de  Pâques. Ils sont littéralement morts de peur !  Mais l’ange du Seigneur, son messager, le même qui a visité Joseph lors d'un rêve,  pour lui annoncer la naissance du site de Jésus, cet ange vient visiter les femmes, pour  les rassurer et leur annoncer la résurrection de Jésus.  Les femmes étaient, nous dit‐on, venues voir le tombeau. On les comprend. Elles  avaient besoin de faire leur deuil, de revenir au lieu du malheur. L’ange va leur  montrer autre chose. Il va leur montrer l'intérieur du tombeau. L'intérieur vide.  C'est pour cela qu'il est venu! C'est pour cela qu'il a roulé la pierre!  On pourrait penser qu'il a roulé cette pierre pour une autre raison: pour faire sortir  Jésus !  Si c'était ça, on nous le montrerait qui sort ! Or le récit donne à comprendre qu'il est  déjà dehors ! Et sur ce point, Matthieu est d'accord avec les récits des autres évangiles!  Lui non plus ne raconte pas la résurrection elle‐même, mais le tombeau vide. Si la mort  n'a pas pu retenir Jésus, comment une pierre, si grosse soit‐elle, l’aurait‐elle pu?!  Il n'est pas ici. Il est vivant. Il n'est plus dans le lieu du souvenir :  il est dans le lieu de la vie !  Il est chez vous, là où vous êtes à la maison, là où vous vivez !   C'est vous qui n'êtes pas au bon endroit, ici dans les tombeaux !   Ne restez pas dans le lieu de la terreur ! 



 

 



  Les femmes sont secouées, exactement comme l'ont été les soldats. Mais à elles, la clé  est donnée. Ce n'est pas sans peur qu'elles repartent. C'est dans une peur mêlée d'une  grande joie, une grande joie mêlée de peur !  Et il suffit qu'elles aient quitté le tombeau pour que déjà elles soient en présence du  Ressuscité !  Celui qui disait qu'il les attend là‐bas en Galilée, est déjà là avec elles. Par leur  changement d'attitude, c'est comme si elles s’étaient affranchis de la distance.  C'est aussi comme ça que nous rencontrons le Christ vivant : en marchant à sa  rencontre !  * * *  Un dernier mot sur l'évangile, ici l'évangile de Matthieu. Pour notre mentalité du XXIe  siècle, ce n'est pas très facile de comprendre cette façon de raconter.  L'évangile est à la fois le récit d'une histoire vraie et un témoignage rendu à la foi en  Jésus‐Christ vivant !  C'est pourquoi les éléments symboliques se mêlent au récit des faits, d'une manière  qui nous trouble.  Pourquoi tous ces tremblements dans l'évangile de Matthieu et pas dans les autres ?  Parce que c'est sa manière de nous dire qu'il y a une histoire derrière l'histoire, que les  événements relatés ont un sens qui dépasse les faits du récit.  

La tempête que Jésus apaise est plus qu'une tempête, elle est un tremblement,  un tremblement qui nous saisit parfois nous aussi, quand nous perdons pied. 



Quand tout Jérusalem tremble à l'arrivée de Jésus, c'est que les événements  qui se préparent ont une portée cachée, une portée universelle. 



Quand nous souffrons du malheur ou de la guerre, quand nous tremblons  devant l'adversité, rien ne justifie cette souffrance, mais Jésus nous révèle que  Dieu n’a pas dit son dernier mot, qu’il est avec nous même dans la souffrance. 



Quand Jésus pousse un grand cri et meurt, le monde entier est secoué, parce  que cette mort ouvre une brèche, qui va rendre l'espoir possible. 



Quand l'ange vient annoncer la victoire de la vie, c'est la mort qui tremble, et  ses adeptes, ceux qui la sèment autour d’eux, ceux qui pensent pouvoir s’en  jouer, ceux qui comptent sur elle pour que le mal qu’ils ont fait soit oublié… 

Mais n'ayons pas peur !   Nous aussi, quittons nos tombeaux pour aller à la rencontre du Christ vivant !   Il nous attend.    Amen    Olivier Schopfer 

2015-04-05 Prédication Pâques.pdf

visuel : L'ange qui descend du ciel, comme l'éclair, blanc comme neige. – acoustique et perceptif : le tremblement de terre (seismos), auquel répond le.

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