Le Sommaire

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

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ÉDITO et INTRODUCTION LA MÉTHODE

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La méthode conjugue deux approches : une par filière, une par métiers. Outre le noyau dur des filières créatives (arts, numérique, audiovisuel…) ont été retenus la mode et le meuble, spécifiques à la région. Les métiers regroupent trois familles : les artistes, les concepteurs et les innovateurs. Une enquête qualitative auprès de 400 chefs d’entreprise complète l’approche. Le choix des filières L’approche par métiers Le croisement filières et métiers Les périmètres géographiques Les relations entre les acteurs

UNE HISTOIRE QUI S’ÉCRIT EN MARCHANT

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La colonisation spontanée de friches industrielles par de jeunes créateurs s’est accompagnée à Nantes d’une mobilisation des acteurs publics, de l’enseignement supérieur et de la recherche. À Saint-Nazaire l’émergence de micro-activités dessine des passerelles entre le monde de la création et celui de l’industrie.

Affinités électives Nantes, la mobilisation des acteurs publics Saint-Nazaire, ville du « faire » Ébullition permanente L’ÉTAT DES LIEUX

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Sur le territoire de Nantes Saint-Nazaire, les filières culturelles et créatives connaissent depuis 20 ans une croissance supérieure au reste de l’économie. Elles restent créatrices d’emplois malgré la crise, et ce sont souvent des entreprises jeunes et en développement. Ce constat globale ne doit pourtant pas faire oublier que les réalités économiques sont très différentes d’une filière à l’autre. 36 400 emplois dans les filières culturelles et créatives Une croissance forte depuis 20 ans L’impact mesuré de la crise Des entreprises en développement

UN VIVIER D’EMPLOIS

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Les emplois créatifs sont présents dans toute l’économie. Ils sont même plus nombreux dans le reste de l’économie que dans les filières culturelles et créatives. À l’inverse, il ne faut pas oublier que ces dernières sont fortement pourvoyeuses d’emplois non créatifs. Le marché du travail y est complexe : qualifications exigées plus élevées, contrats moins durables, temps partiels plus fréquents. Il y a des créatifs dans toute l’économie Il n’y a pas que des créatifs dans les filières culturelles et créatives Un marché du travail plus précaire et plus qualifié La créativité, ressource vitale

L’ÉCOSYSTEME

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Les entreprises du territoire peuvent compter sur un enseignement supérieur diversifié et de qualité. Elles collaborent souvent entre elles, même si des freins sont encore à lever pour renforcer cette « coopétition ». La place de la diffusion est prépondérante dans la mode et le meuble, importante dans le livre, minoritaire au profit de la conception et de la production dans le numérique, l’architecture, la publicité… Un enseignement supérieur qui se renforce Un tissu de petites entreprises Conception, fabrication, diffusion Des collaborations nombreuses mais à conforter

LES SPÉCIFICITÉS DE NANTES / SAINT-NAZAIRE : NUMÉRIQUE, ARCHITECTURE, PUBLICITÉ

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Nantes / Saint-Nazaire concentre 42 % des emplois créatifs de la région Pays de la Loire. Nantes est bien positionnée dans le numérique, l’architecture et la publicité. Sur Saint-Nazaire les filières culturelles et créatives sont en croissance dans la plupart des secteurs sans, pour l’heure, de dominante affirmée.

TABLEAU SYNOPTIQUE

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LOCALISATION DES FILIÈRES CULTURELLES ET CRÉATIVES SUR NANTES MÉTROPOLE ET SAINT-NAZAIRE AGGLOMÉRATION

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CONCLUSION

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L’ introduction

L’ édito Les agences d’urbanisme sont par essence des structures partenariales de débat, d’intermédiation et de production d’expertises territoriales. Elles ont pour mission de suivre les évolutions de l’urbanisation afin de participer à la définition des politiques d’aménagement et de développement, auxquelles elles contribuent par ailleurs. En tant que lieux de veille et de prospective sur les évolutions urbaines, économiques, sociales, sociétales, environnementales…, elles sont à l’affut des signaux faibles susceptibles de devenir les tendances fortes de demain. C’est donc avec enthousiasme que les agences de Nantes et de SaintNazaire, l’Auran et l’Addrn, ont accepté de relever le défi proposé par la Société d’Aménagement de la Métropole Ouest Atlantique (Samoa) : créer un observatoire des industries culturelles et créatives. Tous ceux qui un jour se sont posés la question des champs d’actions que recouvrent ces activités savent combien ils sont difficiles à circonscrire… Peu de sujets ont donné lieu à autant d’écrits sans qu’émerge une définition unanimement reconnue. C’est pourtant l’ambition que se donne cet outil : définir des contours partagés qui révèlent à la fois la diversité et la singularité des Industries Culturelles et Créatives métropolitaines. C’est pourquoi la méthode tient une place si importante dans cet ouvrage. Malgré des limites assumées, la méthodologie retenue cherche à la fois à garantir la possibilité de comparaison des résultats locaux avec d’autres territoires en France et en Europe, et prendre en compte les filières dans leur ensemble. En même temps, il est nécessaire de se raccrocher à la réalité territoriale. Il s’agit notamment de témoigner des spécificités locales, à commencer par les coopérations qui existent entre les agglomérations de Nantes et Saint-Nazaire, aux profils et savoir-faire si complémentaires. La mise en valeur d’initiatives locales sont autant de «  pépites  » qui forgent l’image et l’attractivité de la métropole, apportent des paroles d’acteurs de plus en plus impliqués sur le territoire. Par ailleurs, la révélation des contenus d’une enquête menée auprès de 400 chefs d’entreprises complète ces éclairages issus du terrain. Enfin, pour inscrire les analyses des agences d’urbanisme dans un processus d’accompagnement du «  faire  », l’observatoire des industries culturelles et créatives de Nantes Saint-Nazaire fonctionne aussi grâce à un comité de suivi, auxquels sont associés Nantes Métropole, Saint-Nazaire Agglomération, le Conseil général de Loire-Atlantique, la Région des Pays de la Loire, Pôle Emploi, la Chambre de commerce et d’industrie de Nantes Saint-Nazaire, le laboratoire du Granem (Groupe de Recherche Angevin en Économie et Management) et le Pôle des musiques actuelles. Qu’ils soient ici remerciés pour leur participation active en amont de la réalisation de cet ouvrage. Vous souhaitant une bonne et stimulante lecture,

Philippe Guillotin Directeur général de l’Auran

Claude Maillère Directeur par intérim de l’Addrn

Une révolution silencieuse se produit depuis une dizaine d’années, à l’abri des projecteurs, dans les coursives d’anciennes friches industrielles, sous d’improbables hangars ou dans les bureaux obscurs de quelques chercheurs passionnés. Artistes et

Une révolution silencieuse se produit depuis une dizaine d’années, à l’abri des projecteurs, dans les coursives d’anciennes friches industrielles

ingénieurs, designers et architectes, étudiants et bricoleurs explorent, expérimentent, et surtout partagent leurs trouvailles, leurs découvertes sur fond de mutation technologique et de rapport décomplexé à l’innovation. Ce bouillonnement discret, cette joyeuse effervescence a longtemps fait l’objet d’un regard amusé, voire condescendant de la sphère économique. Les gens sérieux, qui construisent des automobiles ou des avions, qui génèrent de l’emploi et participent à la prospérité collective, imaginaient difficilement que ces sympathiques saltimbanques pourraient, un jour, jouer un rôle de premier plan dans le développement de l’activité économique. Certes, on saluait la réussite fulgurante de certaines entreprises

américaines qui, apparemment sorties de nulle part, parvenaient en quelques années à dominer le marché mondial dans l’univers des nouvelles technologies. Des entreprises qui avaient su conjuguer recherche scientifique et design, réflexion sur les nouveaux usages et applications industrielles. Certes on connaissait le modèle de l’industrie cinématographique, sa logique de cluster à Hollywood, que les pionniers du numérique avaient reproduites en créant la Silicon Valley, mais la bonne vieille rationalité française qui cloisonne depuis deux siècles les formations, les techniques et la production industrielle, éprouvait toutes les difficultés du monde à s’inscrire dans cette logique. La floraison des technopoles, à la fin du XXème siècle, traduisait toujours une logique assise sur la seule efficacité technique. Un ingénieur est un ingénieur, un chercheur un chercheur, un artiste un artiste. Seuls peut-être architectes et designers assuraient un lien ténu entre le monde de l’esthétique et celui de la technique. Et ce n’est sûrement pas un hasard s’ils sont aujourd’hui le pivot de la révolution à bas bruit qui se propage discrètement dans certaines villes françaises, en premier lieu à Nantes et Saint-Nazaire. L’avènement du numérique est sans conteste pour beaucoup dans le décloisonnement des esprits et des pratiques qui se font jour. Aujourd’hui plasticiens et ingénieurs, musiciens et chercheurs utilisent les mêmes outils et se découvrent

un langage commun, qui leur permet de confronter leurs approches, leurs manières de travailler. «  J’ai l’impression que l’on vit un changement de paradigme, témoigne Zaki Jawhari, un architecte nantais qui sculpte la lumière. À un moment donné la science et l’art ont divergé, et aujourd’hui on revient à une approche plus transversale où art et science se rejoignent, comme c’était le cas à la Renaissance, à la croisée de l’architecture, de l’art et de l’ingénierie. » Edwy Plenel, le créateur du pure player Médiapart, ne dit pas autre chose lorsqu’il considère que la montée en puissance d’internet

L’avènement du numérique est sans conteste pour beaucoup dans le décloisonnement des esprits et des pratiques qui se font jour est une avancée comparable à l’invention de l’imprimerie au milieu du XVème siècle  : «  Nous sommes encore loin d’en mesurer toutes les conséquences, tous les prolongements.  » Et au-delà du numérique, se dessine une nouvelle relation au travail, au temps et à l’espace. Le culte de l’objet manufacturé fait place à une recherche de singularité dans une société plus économe, où la récupération, le détournement sont convoqués, à l’image du

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Nazairien Julien Lethuillier, devenu spécialiste de l’impression en trois dimensions en bricolant de vieilles imprimantes récupérées dans un

Cette approche, pondérée par une étude plus fine par métiers, offre une vision panoramique d’un secteur mal connu

dépôt, sur des plans fournis en open source par un professeur du MIT. Mais si de nouveaux métiers naissent, si de nouveaux produits, de nouvelles applications apparaissent chaque jour, nous manquons cruellement d’outils pour mesurer le poids réel de ces activités créatives, qui commencent à féconder les industries traditionnelles, à l’image de l’entreprise Tabisso qui réalise du mobilier contemporain à Saint-Nazaire en s’appuyant sur le savoir-faire des sous-traitants de l’industrie navale et aéronautique. Ce monde éclaté, peu structuré, en mouvement permanent, qui défie les classifications, est difficile à observer. Il n’en pèse pas moins de plus en plus lourd dans l’économie, comme en témoigne la première étude conduite à l’échelle nationale par le cabinet Ernst and Young pour le compte de France Créative, la plate-forme nationale des acteurs du secteur. Cette enquête met, pour la première fois, en lumière le poids économique des « industries culturelles et créatives » dans l’économie hexagonale  : 61,4 milliards d’euros en 2011, supérieur à celui de l’automobile : 60,4 milliards d’euros.

Que recouvrent au juste ces « industries culturelles et créatives » ? Une expression qui nous vient du monde anglo-saxon et qui hérisse le poil des artistes français. Comment peut-on en effet rapprocher deux termes aussi antinomiques qu’industrie et culture ? La culture dans son acception classique est en effet associée à la pièce unique. Une œuvre d’art au sens strict – un tableau, une sculpture - est par définition, singulière, originale. Certes, mais si une œuvre littéraire, une œuvre musicale, une photographie est singulière, l’édition de cette œuvre, sa reproduction à des milliers d’exemplaires procède bien d’une industrie. Il en va de même pour le cinéma, que les Américains n’ont eu aucun état d’âme à considérer dès sa naissance comme une industrie, et par extension de toute la production audiovisuelle. Les jeux vidéos s’inscrivent assez naturellement dans la même logique. À la fois œuvres originales, faisant appel aux talents de créateurs, de graphistes, et objets technologiques, les jeux vidéos se sont d’entrée placés sur le terrain de l’industrie, une industrie d’ailleurs florissante, qui emploie près de 25 000 personnes en France. Pour autant, le spectacle vivant, l’artisanat d’art, la production intellectuelle entrent-elles dans le champ de l’industrie ? Non, au premier abord, et il pourrait sembler plus adapté de choisir une expression plus ouverte, pour recouvrir le champ de la création, comme celle d’activités créatives. La question s’est posée au moment de l’édition de ce premier «  observatoire des filières culturelles et créatives » sur la métropole Nantes/Saint-Nazaire. Mais le fait de choisir une expression plus flottante, moins explicite, pose un double problème : celui de la compréhension intuitive et surtout celui

de la confrontation avec d’autres bassins de création. Un langage commun est une condition première pour comprendre un phénomène et partager les expériences. Même si nous le verrons dans la présentation de l’étude sur les filières créatives, les critères d’élection au statut d’Industries Culturelles et Créatives varient en fonction des approches nationales et locales. Pour trancher, il fallait en revenir à l’étymologie et demander l’arbitrage d’un juge de paix, à l’autorité incontestable  : le Petit Robert. Que nous dit-il ? : Industrie n.f. : 1 - Habileté à exécuter quelque chose = art. 2 – Habileté = ingéniosité, invention, savoir-faire. Pour cette première étude, un second problème se posait : devait-on se limiter à la création et à la production, ou élargir le champ à la diffusion et à la distribution. Il ne s’agit plus ici d’une question de vocabulaire, mais de périmètre d’observation. Le choix a été fait d’intégrer l’ensemble des acteurs de chacune des filières culturelles et créatives retenues, à l’image de la mode ou du meuble. Cette approche, pondérée par une étude plus fine par métiers, offre une vision panoramique d’un secteur mal connu, ou plutôt mal identifié, et met en lumière une réalité concrète jusqu’alors observée de façon parcellaire. Cet outil de compréhension donne la mesure de la diversité et du poids des activités créatives sur la métropole Nantes Saint-Nazaire et offre une base de réflexion pour mieux appréhender les mutations en cours.

Les Industries Culturelles et Créatives, un terme qui fait débat Une définition non figée… À l’apparition du terme « industries culturelles  » dans les années 1950 a succédé plus récemment celui «  d’industries créatives  » qui fait référence à une économie dite créative. La différence entre les deux parait assez ténue, d’autant plus que certains auteurs n’hésitent pas à utiliser de manière égale l’une ou l’autre. Ces nuances s’expliquent par des choix (statistiques et/ou politiques) qui cherchent à mettre en avant les spécificités économiques des territoires. Malgré cette diversité et, comme le souligne très justement E. Vivant et D.G Tremblay (2010)1, la plupart des auteurs francophones reprennent la définition du Département de la Culture, des Médias et du Sport du gouvernement Britannique, selon laquelle les industries créatives «  trouvent leur origine dans la créativité, les compétences et le talent d’une personne et ont un fort potentiel de croissance et d’emploi à travers la production et l’exploitation de la propriété intellectuelle  ». DCMS (1998). De manière générale ces industries s’inscrivent dans une double logique de production créative et de reproduction industrielle. Leurs créations ne répondent pas uniquement à des besoins fonctionnels ; elles sont porteuses de sens, d’un contenu esthétique ou sémiotique dont l’évaluation est subjective.

… Qui répond à une volonté de mesurer À la fin des années 1990, la délimitation par le gouvernement britannique des industries créatives, incluant de nombreuses activités culturelles

a permis de mesurer de manière quantitative ce que produisaient ces industries en termes d’emploi et de PIB. Cette étape a été décisive. Oui ! La culture et ses activités au sens large produisent de la valeur sur les territoires. Depuis lors, un engouement n’a cessé de croitre et les tentatives d’évaluation et de mesure des Industries Culturelles et Créatives s’opèrent à toutes les échelles  : européenne, nationale, régionale ou locale. Pour preuve les récents rapports publiés par Ernest and Young pour le collectif France Créative en novembre 2013 ou encore le rapport conjoint de l’Inspection générale des Finances et l’Inspection générale des affaires culturelles «  L’apport de la culture à l’économie française  » paru en décembre 2013.

… largement critiquée Le développement de ces industries a permis d’assouplir le débat sur le rapprochement culture - économie construit sur les critiques émises par l’École de Francfort dans les années 1950. Ces auteurs mettaient en garde contre une industrialisation croissante de la culture dont les produits seraient en contradiction avec l’essence de l’art. En effet, le terme «  industries culturelles  » fait directement référence à une logique tayloriste dans la production culturelle. S’oppose à cette logique une vision romantique de l’artiste en rupture avec des logiques économiques et pour lequel le geste artistique ne peut ni ne doit être reproduit. Beaucoup d’auteurs continuent à contester une utilisation de la culture à des fins commerciales opposant le beau et l’utile, la forme et

la fonction. Sans conforter ce débat, il convient de rester vigilant face à ces données quantitatives et mettre en garde contre une mesure des Industries Culturelles et Créatives qui ne prenne en compte qu’une partie de la valeur produite par la culture sur les territoires. Gouverner les industries culturelles et créatives avec des outils politiques classiques est un risque car elles ne sont ni stables ni normées. Elles sont des objets complexes et différenciés qui nécessitent une politique hybride et évolutive capable d’appréhender des intersections. Ces politiques doivent se faire de manière co-évolutive en concertation avec les principaux intéressés. On est loin de l’approche normative héritée des institutions et souvent pratiquée sur les territoires. Or, les structures de gouvernance actuelles ne correspondent que très rarement aux pratiques. Tout l’enjeu « pour le haut » est de définir une gouvernance adaptée «  pour le bas  » et non plus une politique dédiée. Pratt (2012)2 insiste sur la nécessité de mieux comprendre leur écologie organisationnelle et leurs particularités avant de déployer des interventions politiques pour les soutenir. Mieux comprendre les pratiques et les évolutions des industries culturelles et créatives pour mieux soutenir leur développement… voici un des enjeux de cet observatoire.

1

 Vivant et D.G Tremblay (2010), L’économie créative, Revue des travaux francophones, Note de recherche de la Chaire de recherche E. du Canada sur les enjeux socio-organisationnels de l’économie du savoir, Téluq-UQAM 71p.

2

 ndy Pratt (2012) The cultural and creative industries: organisational and spatial challenges to their governance, Die Erdre Vol 143, A no 4,18p.

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exemples de sous-secteurs compris dans la définition des indutries culturelles et créatives Organisations internationales

Soussecteurs

Pays

Régions

CNUCED

RoyaumeUni

Allemagne

Espagne

France

Australie

Irlande du Nord

Ontario

Oregon

Industries créatives

Industries créatives

Industries créatives et culturelles

Industries culturelles

Secteur culturel

Industries créatives

Industries créatives

Industries créatives

Industries créatives

Architecture













Audiovisuel



















Arts de la scène



















Bibliothèque







Design















Arts visuels

























Édition







Mode







Logiciel/ multimédia







Musées/ patrimoine culturel



Musique







Artisanat







Publicité







√ √



























√ √ √

Source : Chambre de Commerce du Montréal Métropolitain « Les industries créatives : catalyseurs de richesse et de rayonnement pour la métropole, Novembre 2013, 70p. »



















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la méthode

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La méthode

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Le choix des filières Une filière désigne l'ensemble des activités complémentaires qui concourent, d'amont en aval, à la réalisation d'un produit fini. À partir du moment où une activité est repérée comme faisant partie du champ des industries culturelles et créatives (édition de livres par exemple), le choix a été fait d’inclure dans l’observation l’ensemble de la filière à laquelle elle appartient (imprimerie et commerce de détail de livres en magasin spécialisé par exemple). Ainsi, dans la mode, l’observatoire prend en compte les stylistes, mais aussi les fabricants de vêtements, de chaussures, de sacs, de lunettes qui participent à la production des biens, et les vendeurs qui les diffusent.

Les filières retenues

Schéma de fonctionnement d’une filière

Produits culturels non reproductibles dif

Création

production

distribution

Cette approche, particulièrement complète et intégratrice, permet de donner un véritable aperçu de l’importance du processus créatif pour des filières économiques entières. Elle traduit bien les logiques amont/aval, les logiques de création de valeur ajoutée et de diffusion au reste de l’économie. Néanmoins, elle n’a de sens que si les différentes étapes du processus de fabrication du produit sont distinguées : création, production/édition, diffusion/distribution. L’utilisation des nomenclatures statistiques françaises oblige à ne constituer que deux blocs : création/production/édition et diffusion/distribution.

meuble

fu s

ion / Distribu

tio n

n uctio / éditio od n pr t créa ion

Musique vidéo/tv Radio

numérique

L’approche par filière, un choix qui peut être contesté En revanche, elle permet de distinguer par filière le poids des activités de création et de diffusion. Sur la région Pays de la Loire, seule la filière mode compte plus d’emplois liés aux activités « diffusion » que de « création ». D’autres analyses choisissent de cibler uniquement les activités de création et de production. C’est le cas de la dernière étude Montréalaise qui exclut certaines activités

Livre

activités de soutien / services créatifs

mode et accessoires

L’approche par filières est un choix méthodologique qui permet de prendre en compte la logique industrielle (de la recherche-création à la commercialisation) des Industries Culturelles et Créatives. Pour les sceptiques cette option permet de «  ratisser large  » voir de « gonfler les chiffres » en tout cas, de s’éloigner de ce qui constitue le cœur de cette économie c’est-à-dire des « créateurs ».

la méthode

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de fabrication, de distribution, de diffusion (comme les musées) et de vente, de mêmes que les services de soutien comme les écoles ou les associations professionnelles.

Les filières retenues dans l’observatoire Les trois sphères représentent l’ensemble de l’économie et la progression de la chaine de valeur (création/conception, production/édition, diffusion/distribution). Les filières culturelles et créatives (meuble, produits culturels non reproductibles, mode, numérique, musique, audiovisuel, cinéma, livre), sont symbolisées par des barres de couleur. Leur inclusion dans la sphère grise montre qu’elles interagissent avec les autres filières. De leur côté, les services créatifs (design, publicité, architecture, photographie), sont une ressource transversale au tissu économique.

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Les activités françaises et européennes sont classées en 732 postes. En effet, tout établissement se voit attribuer un code APE (Activité Principale Exercée) par référence à la Nomenclature d'Activités Française (codes NAF). 83 secteurs d’activités sur 732 ont ainsi été retenus dans cette analyse. En voici le détail par filières :

Produits culturels non reproductibles 8552Z 9001Z 9002Z 9003A

Enseignement culturel Arts du spectacle vivant Activités de soutien au spectacle vivant Création artistique relevant des arts plastiques

9003B

Autre création artistique

9004Z

Gestion de salles de spectacles

9102Z

Gestion des musées

9103Z

Gestion sites monuments historiques et attractions touristiques similaires

Ces activités sont celles qui font le plus « naturellement » partie des industries culturelles. Dans certaines études elles sont identifiées comme le cœur de ces activités. La filière loisirs n’ayant pas été retenue dans l’observatoire, les activités liées notamment aux parcs à thème ou à l’industrie du jeu (hormis les jeux vidéo, qui sont rattachés à la filière numérique) sont absentes.

Musique, audiovisuel, cinéma 1820Z

Reproduction d’enregistrements

3220Z

Fabrication d’instruments de musique

4763Z 5911A 5911C 5912Z 5913A

Commerce de détail d’enregistrements musicaux et vidéo (magasin spécialisé) Production de films et de programmes pour la télévision Production de films pour le cinéma Post-production de films cinématographiques, de vidéo et de programmes de télévision Distribution de films cinématographiques

5913B

Édition et distribution vidéo

5913B

Projection de films cinématographiques

5920Z

Enregistrement sonore et édition musicale

6010Z

Édition et diffusion de programmes radio

6020A

Edition de chaînes généralistes

6020B

Edition de chaînes thématiques

7722Z

Location de vidéocassettes et disques vidéo

Par souci de simplicité, les activités liées au son et à l’image ont été rassemblées dans une même filière, car les codes NAF ne permettent pas toujours de les distinguer.

6202A

Conseil en systèmes et logiciels informatiques

4642Z

6312Z

Portails Internet

4648Z

6209Z

Autres activités informatiques

Les activités de la filière numérique sont prises en compte dans l’observatoire, car elles sont fortement utilisatrices et pourvoyeuses de contenus culturels. Les activités concourant à la production de matériel (« hardware ») n’ont pas été retenues, tels que les opérateurs de télécommunication et l’industrie électronique. Il a été considéré qu’il s’agissait d’une autre filière.

4771Z 4772A 4772B 4777Z 4778A

LIVRE 1811Z

Imprimerie de journaux

1812Z

Autre imprimerie (labeur)

1813Z

Activités de pré-presse

1814Z

Reliure et activités connexes

4761Z 4762Z

Commerce de détail de livres en magasin spécialisé Commerce de détail de journaux et papeterie en magasin spécialisé

5811Z

Édition de livres

5813Z

Édition de journaux

5814Z

Édition de revues et périodiques

5819Z

Autres activités d’édition

9101Z

Gestion des bibliothèques et des archives

L’ensemble des activités liées aux produits culturels que sont le livre ou le journal, de sa fabrication (imprimerie) à sa diffusion (librairies, bibliothèques) ont ici été rassemblées. Les activités situées en amont de la filière (industrie de fabrication du papier) n’ont pas été prises en compte.

Numérique 5821Z 5829A 5829B

Édition de jeux électroniques Édition de logiciels système et de réseau Edition de logiciels outils de développement et de langages

5829C

Edition de logiciels applicatifs

6201Z

Programmation informatique

Mode et accessoires 1411Z

Fabrication de vêtements en cuir

1412Z

Fabrication de vêtements de travail

1413Z 1414Z 1419Z 1420Z 1431Z 1439Z 1511Z 1512Z

Fabrication de vêtements de dessus Fabrication de vêtements de dessous Fabrication d’autres vêtements et accessoires Fabrication d’articles en fourrure Fabrication d’articles chaussants à mailles Fabrication d’autres articles à mailles Apprêt, tannage des cuirs; préparation et teinture des fourrures Fabrication d’articles de voyage, de maroquinerie et de sellerie

1520Z

Fabrication de chaussures

2652Z

Horlogerie

3212Z 3213Z

Fabrication d’articles de joaillerie et bijouterie Fabrication articles bijouterie fantaisie & articles similaires

3250B

Fabrication de lunettes

4616Z

Intermédiaires du commerce en textiles, habillement, fourrures, chaussures & articles en cuir

4782Z 2042Z 4645Z 4645Z

Commerce de gros d’habillement et de chaussures Commerce de gros d’articles d’horlogerie et de bijouterie Commerce de détail d’habillement en magasin spécialisé Commerce de détail de la chaussure Commerce de détail de maroquinerie et d’articles de voyage Commerce de détail d’articles horlogerie & bijouterie (magasins spécialisés) Commerces de détail d’optique Commerces de détail textiles habillement & chaussures sur éventaires & marchés Fabrication de parfums et de produits pour la toilette Commerce de gros de parfumerie et de produits de beauté Commerce de gros de parfumerie et de produits de beauté

La mode (vêtements et chaussures) et ses accessoires (bijoux, sacs, lunettes, montres) ont été intégrés à l’observatoire étant donnée la part essentielle que représentent la culture et la créativité dans l’élaboration des produits. Encore une fois, l’ensemble de la filière a été intégrée, de la fabrication des vêtements à leur commercialisation, à l’exception de la fabrication de textiles.

4759A

Commerce de détail de meubles

Pour les mêmes raisons que la mode, l’industrie du meuble a été intégrée à l’observatoire étant donnée la part essentielle que représentent la culture et la créativité dans la conception des produits. L’amont a également été écarté (industrie du bois).

Les services créatifs Sont répertoriées ici des activités créatives qui ne forment pas à proprement parler une filière, mais qui sont des services transversaux à l’ensemble de l’économie (publicité, design), ou des activités en soi créatives (architecture, information).

Design 7410Z

Activités spécialisées de design

Architecture 7111Z

Activités d’architecture

publicité 5911B

Production de films institutionnels et publicitaires

7311Z

Activités des agences de publicité

7312Z

Régie publicitaire de médias

photographie 7420Z

LE MEUBLE 3101Z 3102Z 3109A 3109B

4615Z

4647Z

Fabrication de meubles de bureau et de magasin Fabrication de meubles de cuisine Fabrication de sièges d’ameublement d’intérieur Fabrication autres meubles & industries connexes de l’ameublement Intermédiaires de commerce en meubles, articles de ménage et quincaillerie Commerce de gros de meubles, de tapis et d’appareils d’éclairage

Activités photographiques

information 6391Z 6399Z

Activités des agences de presse Autres services d’information nca

Dans les activités de diffusion, les commerces non spécialisés n’ont pas été intégrés (les supermarchés par exemple), bien qu’ils vendent des produits des industries culturelles et créatives. Il est difficile de savoir localement quelle part de leurs activités ils y consacrent. Pour coller aux standards européens, la gastronomie a été exclue (vin, chocolat, restauration…), bien qu’à une échelle strictement française, sa place apparaît comme pleinement légitime. Cela fait d’ailleurs partie des débats entre les différentes cultures européennes.

la méthode

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L’approche par métiers

Les limites de l’exercice On l’a vu, l’activité de l’établissement économique est repérée par son code NAF (Nomenclature d’Activité Française) ou APE (Activité Principale Exercée). En matière d’observation économique, c’est le niveau d’analyse le plus fin qui existe, hors enquêtes ou études particulières. Il permet une analyse comparée, à l’échelle française et européenne depuis l’uniformisation des nomenclatures en 2008, mais confronte

l’analyse à plusieurs difficultés  : problème pour reconstituer les filières, manque de précision de certains codes, difficulté à repérer les pratiques amatrices... Ces difficultés sont en partie palliées par la complémentarité de l’approche métiers.

Cette approche se base sur une interprétation libre de l’analyse de Richard Florida. Il s’agit ainsi de reprendre l’idée de trois familles de métiers créatifs aux caractéristiques différenciées, mais sans se calquer sur les choix qu’il a effectués pour leur donner un contenu. Pour ce faire, la nomenclature Profession et Catégories Socio-professionnelles (PCS) a été utilisée. Il s’agit d’un instrument multidimensionnel de représentation de la structure sociale, qui croise différents critères comme la profession, le statut, le niveau de qualification et la position hiérarchique.

Sébastien Chantelot Enseignant-chercheur Il n’existe pas de forme canonique pour circonscrire les industries « culturelles et créatives. » Je préfère d’ailleurs, pour ma part, parler d’industries créatives, considérant que les industries culturelles sont, par définition, créatives et sont englobées dans la formule «  industries créatives  ». L’approche par filières est pertinente en ce qu’elle pousse très loin dans les branches et n’oublie personne. Même si cette approche rajoute en complexité. La difficulté provient de la nomenclature française, qui compte plus de 700 niveaux mais ne permet pas toujours de dissocier les activités de création, de production ou de diffusion. C’est par exemple le cas dans les domaines de l’imprimerie ou du cinéma, mais aussi dans l’artisanat. À partir de quel moment un artisan peut-il être considéré comme un artisan d’art ? Ce n’est pas toujours clair dans la nomenclature. Nous sommes, de ce point de vue, en retard sur les anglo-saxons. Mais en croisant les données avec une approche par métiers et par spécialités (il y a des créatifs dans les entreprises traditionnelles), ce qu’on appelle le trident, on parvient à obtenir une bonne représentation de ces industries et les tendances que l’on observe sont les bonnes.

Cette approche présente plusieurs atouts. Elle offre un complément par rapport au regard centré sur les filières. Elle permet d’identifier des professions pour lesquelles aucun code NAF n’existe véritablement ou qui sont mal identifiées par les nomenclatures d’activités, notamment dans le secteur artistique (les auteurs littéraires par exemple). Elle fait émerger l’idée que la production de contenus culturels ou créatifs n’est pas la seule propriété des métiers liés à l’art. En effet, les professions qui encadrent ou initient le changement et l’innovation sont tout aussi essentielles au processus créatif.

Les métiers retenus Une classification des métiers créatifs en trois familles, basée sur les professions et catégories socioprofessionnelles (PCS), a permis de retenir pour l’analyse 87 professions sur 487.

Les artistes Il s’agit des métiers qui produisent des contenus matériels et immatériels relevant du domaine de l’art.

214e Artisans d’art 227a 352b 353b

353c

Indépendants gestionnaires de spectacle ou de service récréatif, de 0 à 9 salariés Auteurs littéraires, scénaristes, dialoguistes Directeurs, responsables de programmation et de production de l’audiovisuel et des spectacles Cadres artistiques et technico-artistiques de la réalisation de l’audiovisuel et des spectacles

354a Artistes plasticiens

354g 465a

465b 465c 488a

635a

637a

354b Artistes de la musique et du chant 354d

Artistes de la danse, du cirque et des spectacles divers

354c Artistes dramatiques

Professeurs d’art (hors établissements scolaires) Concepteurs et assistants techniques des arts graphiques, de la mode et de la décoration (indépendants et salariés) Assistants techniques de la réalisation des spectacles vivants et audiovisuels (indépendants ou salariés) Photographes (indépendants et salariés) Maîtrise de restauration  : cuisine/ production Tailleurs et couturières qualifiés, ouvriers qualifiés du travail des étoffes (sauf fabrication de vêtements), ouvriers qualifiés de type artisanal du travail du cuir Modeleurs (sauf modeleurs de métal), mouleurs-noyauteurs à la main, ouvriers qualifiés du travail du verre ou de la céramique à la main

637b Ouvriers d’art 637c

Ouvriers et techniciens des spectacles vivants et audiovisuels

Les concepteurs Cette catégorie peut se subdiviser en deux parties :

1

Les manipulateurs de symboles Ce sont des métiers qui font avancer ou transmettent la connaissance humaine en matière de sciences humaines. Il peut également s’agir de ceux qui participent directement à la création de contenus informationnels non artistiques.

Psychologues, psychana311d lystes, psychothérapeutes (non médecins) 312a Avocats Conseils et experts libéraux en études économiques, 312d organisation et recrutement, gestion et fiscalité 312f Architectes libéraux

la méthode

16

19

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014 333a Magistrats 341a 342a 343a 351a 352a 353a 372a

Professeurs agrégés et certifiés de l’enseignement secondaire Enseignants de l’enseignement supérieur Psychologues spécialistes de l’orientation scolaire et professionnelle Bibliothécaires, archivistes, conservateurs et autres cadres du patrimoine (fonction publique) Journalistes (y. c. rédacteurs en chef) Directeurs de journaux, administrateurs de presse, directeurs d’éditions (littéraire, musicale, audiovisuelle et multimédia) Cadres chargés d'études économiques, financières, commerciales

372e Juristes Chefs de produits, acheteurs du 374b commerce et autres cadres de la mercatique 375a Cadres de la publicité 375b

Cadres des relations publiques et de la communication

382b Architectes salariés 421a Instituteurs 421b Professeurs des écoles 422a

Professeurs d’enseignement général des collèges

311f

Pharmaciens libéraux

312e

Ingénieurs conseils libéraux en études techniques

342e Chercheurs de la recherche publique 344a

344b Médecins salariés non hospitaliers 344c

422c 423b 464a 464b

2

Les innovateurs

Ce sont les métiers qui valorisent et font prospérer la création intellectuelle scientifique et technique. Il peut également s’agir de ceux qui font avancer et transmettent la connaissance humaine en la matière.

311a Médecins libéraux spécialistes 311b Médecins libéraux généralistes Chirurgiens-dentistes (libéraux ou 311c salariés) 311e Vétérinaires (libéraux ou salariés)

Internes en médecine, odontologie et pharmacie

344d Pharmaciens salariés Ingénieurs et cadres d’étude et 381a d’exploitation de l’agriculture, la pêche, les eaux et forêts Ingénieurs et cadres d’étude du 382a bâtiment et des travaux publics Ingénieurs et cadres d’étude, 383a recherche et développement en électricité, électronique 383b

Ingénieurs et cadres de fabrication en matériel électrique, électronique

Ingénieurs et cadres d’étude, 384a recherche et développement en mécanique et travail des métaux 384b

385b

Ingénieurs et cadres de fabrication des industries de transformation (agroalimentaire, chimie, métallurgie, matériaux lourds)

Ingénieurs et cadres d’étude, recherche et développement des 386a autres industries (imprimerie, matériaux souples, ameublement et bois, énergie, eau) Ingénieurs et cadres de la produc386d tion et de la distribution d’énergie, eau Ingénieurs et cadres de fabrication des autres industries (imprimerie, 386e matériaux souples, ameublement et bois) 387c

Ingénieurs et cadres des méthodes de production

Ingénieurs et cadres du 387d contrôle-qualité 387f

Chefs de projets informatiques, responsables informatiques

472a

Dessinateurs en bâtiment, travaux publics

Dessinateurs en électricité, électro473a mécanique et électronique Techniciens de recherche-développement et des méthodes de 473b fabrication en électricité, électromécanique et électronique 474a

474b

475a

478a 479a

Ingénieurs et cadres de fabrication en mécanique et travail des métaux

Ingénieurs et cadres d’étude, recherche et développement 385a des industries de transformation (agroalimentaire, chimie, métallurgie, matériaux lourds)

422b Professeurs de lycée professionnel Maîtres auxiliaires et professeurs contractuels de l’enseignement secondaire Formateurs et animateurs de formation continue Assistants de la publicité, des relations publiques (indépendants ou salariés) Interprètes, traducteurs (indépendants ou salariés)

Médecins hospitaliers sans activité libérale

388c

Ingénieurs et cadres techniques de l'environnement

Ingénieurs et cadres d’étude, 388a recherche et développement en informatique

Dessinateurs en construction mécanique et travail des métaux Techniciens de recherche-développement et des méthodes de fabrication en construction mécanique et travail des métaux Techniciens de recherche-développement et des méthodes de production des industries de transformation Techniciens d’étude et de développement en informatique Techniciens des laboratoires de recherche publique ou de l’enseignement

Les décideurs Ce sont les métiers qui encadrent le changement, l’innovation et la création, sans être forcément eux-mêmes engagés dans les processus créatifs.

231a

Chefs de grande entreprise de 500 salariés et plus

Richard Florida et sa « classe créative » très controversée Richard Florida3 fait partie de ces chercheurs américains qui ont su d’emblée séduire l’élite dirigeante grâce à une théorie choc, celle de «  la classe créative ». Très en vogue chez les décideurs publics mais lourdement critiquée par la communauté scientifique, sa théorie a néanmoins permis d’élargir un débat fondamental en accordant une place importance à la culture, à la créativité et aux innovations comme facteurs nouveaux de développement économique. Comme le souligne S. Chantelot4, Florida «  a érigé la créativité comme compétence clé de l’économie (…) et postulé que les villes doivent attirer les individus créatifs pour connaître des niveaux élevés de croissance économique  ». Pour attirer cette «  classe créative », rien de plus simple : les villes doivent répondre à la règle des «  TTT  ». Tolérance, Talent et Technologie. On comprend facilement pourquoi sa théorie a été taxée de simpliste. Si elles accumulent des talents, qu’elles sont 3

tolérantes et développent de la technologie ces villes forcément « créatives » connaitront un fort développement socio économique. À le lire, un tiers des actifs nord-américains faisait d’ores et déjà partie de la «  classe créative  » en 1999. Cette large catégorie d’actifs se décompose en trois groupes dont les activités sont détaillées par l’INSEE5 : • les «  creative bohemians  » soit des professions artistiques comme les artisans d’art, les journalistes, les cadres artistiques des spectacles, les photographes, les ouvriers d’art, les plasticiens, les cinéastes etc ; • les «  creative core  » soit les individus engagés dans un processus hautement créatif dont la production est définie comme porteuse d’un concept nouveau, immédiatement transférable et largement utilisable. Ils appartiennent à des domaines aussi divers que la science, l’ingénierie, l’architecture ou encore l’éducation, et leurs

fonctions reposent sur la création de nouvelles idées, de nouvelles technologies, ou de tout autre produit créatif ; • les «  creative professionals  » soit les individus qui sont créatifs à partir de routines et qui s’appuient sur des bases de connaissances parfois complexes pour réaliser une tâche ou juger une situation. Font partie de cette classe les chefs d’entreprise, les médecins, les avocats etc… Malgré le vigoureux débat qui a secoué la communauté scientifique à la parution des travaux de Florida, son apport a fait date et coïncide avec un virage culturel dans les politiques urbaines. Il est d’autant plus fort dans des villes moyennes dont le poids économique relatif ne permet pas de rivaliser autrement dans la compétition mondiale.

Florida, R. (2002), The rise of the creative class, Basic Books, New York S. Chantelot (2010) La géographie de la classe créative : une application aux aires urbaines françaises. Canadian Journal of Regional Sciences ISSN : 1925-2218 Vol. 33 (3) : 89-108.

232a

Chefs de moyenne entreprise, de 50 à 499 salariés

4

5

233a

Chefs d’entreprise du bâtiment et des travaux publics, de 10 à 49 salariés

233b

Chefs d’entreprise de l’industrie ou des transports, de 10 à 49 salariés

233c

Chefs d’entreprise commerciale, de 10 à 49 salariés

233d

Chefs d’entreprise de services, de 10 à 49 salariés

335a

Personnes exerçant un mandat politique ou syndical

341b

Chefs d’établissement de l’enseignement secondaire et inspecteurs

380a

Directeurs techniques des grandes entreprises

INSEE, La créativité, clé de l’économie fondée sur la connaissance, Économie Lorraine n°199-200 Décembre 2009

Les limites de l’approche Outre les limites inhérentes à la classification en PCS, les métiers évoluent plus vite que les nomenclatures, particulièrement dans ces filières (web designer, community manager… sont des métiers qui n’existaient pas il y a dix ans). Il est ainsi difficile de classer certaines professions nouvelles dans les catégories existantes. En corollaire, une certaine hétérogénéité peut exister pour une seule et même profession, qui peut recouvrir des réalités somme toute différentes.

Si cette approche permet de trouver des professions mal identifiées par les nomenclatures d’activités, elle ne permet pas de repérer des actifs qui pratiquent une activité culturelle et créative en amateurs ou en complément d’activité. Par exemple, nombre d’écrivains, musiciens, peintres, plasticiens, scénaristes… de talent, et reconnus comme tels, peuvent se trouver dans ce cas.

la méthode

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21

la méthode

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Le croisement filières et métiers

Vincent Priou Directeur de Trempolino Aujourd’hui un musicien est inscrit dans les nouvelles technologies, l’expérimentation, l’interaction entre l’image, le son, la communication… Par ailleurs, les langages artistiques se croisent, se fécondent. Trempolino est là pour créer les conditions de ces rencontres, pour que les choses puissent se faire, et ce n’est pas un hasard si notre première résidence a accueilli Elsa Tomkowiak une plasticienne. Il ne s’agit pas seulement de proposer des lieux de répétition, des formations ou de l’accompagnement, comme nous avons pu le faire avec Dominique A, Philippe Catherine ou C2C, ce qui reste nécessaire et précieux pour les artistes, mais de soutenir les opérateurs et les projets qui émergent, dans toutes leurs dimensions, de la musique enregistrée au spectacle vivant. Tout en respectant un certain nombre de valeurs, l’indépendance des musiciens et de la création. Depuis 1990, nous nous efforçons de structurer la filière et de jeter des passerelles avec l’enseignement supérieur, avec l’économie, en expérimentant, dans des logiques de recherche-action. Aussi, nous travaillons sur des fonds de garantie, sur du partenariat, de la mutualisation car nous défendons l’idée selon laquelle la culture n’est pas qu’une logique de marché6. Bref nous avons en quelque sorte fait un cluster avant l’heure. L’Île de Nantes est un espace de bouillonnement et nous nous sentons bien ici, où nous planchons actuellement sur un projet de biennale internationale européenne : « Nantes Music Masters ».

6

charte éthique culturelle de Trempolino / www.trempo.com

Le croisement de ces deux approches permet de mettre en évidence quatre catégories d’emplois : • Les emplois créatifs dans les activités créatives • Les emplois créatifs dans les activités non créatives • Les emplois non créatifs dans les activités créatives

• Les emplois non créatifs dans les activités non créatives

FILIÈRES ÉCONOMIQUES

PROFESSIONS

20

INDUSTRIES CULTURELLES ET CRÉATIVES

AUTRES

CRÉATIVES

CRÉATIFS DANS LES ACTIVITÉS CRÉATIVES

CRÉATIFS DANS LES ACTIVITÉS NON CRÉATIVES

NON CRÉATIVES

NON CRÉATIFS DANS LES ACTIVITÉS CRÉATIVES

NON CRÉATIFS DANS LES ACTIVITÉS NON CRÉATIVES

L’approche par le « trident » montre que les emplois créatifs peuvent se trouver dans des activités qui ne font pas partie des filières identifiées comme créatives. Elle permet aussi de quantifier la part des emplois réellement créatifs dans les filières créatives. Elle met en lumière les opportunités de «  fertilisation croisée  » entre les filières et les métiers créatifs et le reste de l’économie.

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Les périmètres géographiques Les périmètres d’analyse retenus pour l’observatoire sont Nantes Métropole et Saint-Nazaire Agglomération ; les aires urbaines fonctionnelles7 de Nantes et de Saint-Nazaire ; la région Pays de la Loire. Afin de comparer les aires urbaines fonctionnelles de Nantes et de Saint-Nazaire, dont la taille et le profil sont très différents, plusieurs territoires affichant d’un nombre d’emplois proche ont été sélectionnés : •A  ire urbaine fonctionnelle de Nantes  : Lyon, Aix-Marseille, Lille, Toulouse, Nice, Bordeaux, Strasbourg, Grenoble, Toulon, Montpellier, Rennes, Saint-Etienne, Tours, Caen, Rouen, Perpignan, Avignon, Clermont-Ferrand, Nancy •A  ire urbaine fonctionnelle de Saint-Nazaire : Béthune, Dunkerque, Le Havre, Saint-Brieuc, Quimper, Lorient, Poitiers, La Rochelle, Angoulême, Bayonne, Pau, Valence, Annecy, Chambéry, Troyes, Besançon, Montbéliard, Colmar, Thionville En outre, une comparaison entre la région des Pays de la Loire et les autres régions françaises a été effectuée (hors Ile de France, au profil très spécifique).

LES PÉRIMÈTRES D’ANALYSE ET DE COMPARAISON Dunkerque Béthune Lille

Le Havre Rouen

Nantes Métropole et Saint-Nazaire Agglomération

Thionville

Caen Nancy Strasbourg

Saint-Brieuc Quimper Lorient

Troyes

Rennes

Saint-Nazaire

Nantes

Colmar Montbéliard

Tours

Besançon

Poitiers La Rochelle Angoulême

Clermont-Ferrand

Lyon

Saint-Étienne

Grenoble

Avignon Bayonne

Pau

Toulouse

Montpellier

7

Nice

Région Pays de la Loire

Marseille - Aix Toulon

Perpignan

Aires urbaines fonctionnelles auxquelles celle de Nantes est comparée Aires urbaines fonctionnelles auxquelles celle de Saint-Nazaire est comparée

Annecy Chambéry

Valence

Bordeaux

Aires urbaines fonctionnelles de Nantes et Saint-Nazaire

Autres aires urbaines fonctionnelles françaises

 otion proche de l’aire urbaine telle que l’Insee la définit, et dont le périmètre est disponible pour tout N le territoire européen. Raisonner en termes d’aires urbaines fonctionnelles laisse donc ouverte à l’observatoire la possibilité de comparer les territoires à l’échelle européenne.

Les relations entre les acteurs François Delarozière Directeur de la compagnie La Machine La création, pour moi, est dans la confrontation avec le réel, dans la fréquentation des hommes. Tout est dans la façon de faire. Tout le monde a de supers idées mais il faut savoir les mettre en œuvre. La vraie création c’est la mise en œuvre. La proximité, le voisinage interviennent nécessairement, facilitent les croisements, mais je suis persuadé qu’avant tout c’est la rencontre entre les hommes qui compte, le frottement de gens qui ont envie de faire des choses ensemble, de partager. Sans la rencontre avec Jacques Soignon et Romaric Perrocheau du service des espaces verts de la ville de Nantes, l’expédition végétale n’aurait pas pu voir le jour. Avec l’école d’architecture, où j’enseigne la scénographie, nous avons créé de véritables passerelles. Et nous travaillons sur des projets concrets. Nos constructeurs rencontrent les étudiants, tout comme les lycéens de La Joliverie ou de Livet. Pour autant, la rencontre n’arrive pas forcément où on l’attend. C’est une chimie entre deux personnes : un industriel avec un artiste, un geek avec un manuel, ça ne se décide pas. À Nantes, le terrain est propice, mais il faut prendre garde à ne pas trop aménager les cadres. Trop d’encadrement tue la création. Il faut laisser de grandes pages blanches dans la ville, des friches, des squats. Il faut des bars, et évidemment préserver des lieux pour faire la fête.

la méthode

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Au-delà de l’observation statistique, ce sont aussi les relations entre acteurs qui dessinent les contours d’une filière et caractérisent un écosystème. C’est pourquoi une enquête a été réalisée par la Chambre de commerce et d’industrie de Nantes Saint-Nazaire auprès de 400 chefs d’entreprise de Loire-Atlantique. Cette enquête était destinée à faire émerger les enjeux propres aux filières culturelles et créatives et à mesurer la place de la créativité dans l’entreprise. Il s’agissait de comprendre les relations au sein d’une filière et les interactions avec le reste de l’économie.

Filières

Nombre de répondants à l’enquête

Part des répondants dans l’enquête

Nombre d’établissements dans les aires urbaines fonctionnelles de Nantes et Saint-Nazaire

Part des filières au sein des industries culturelles et créatives dans les aires urbaines fonctionnelles de Nantes et Saint-Nazaire

Architecture

55

14 %

827

10 %

Produits culturels non reproductibles

29

7 %

942

11 %

Design

16

4 %

431

5 %

Information

2

1 %

33

0 %

Livre

37

9 %

687

8 %

Meuble

27

7 %

459

5 %

Mode

51

13 %

2 388

29 %

Musique audiovisuel cinéma

6

2 %

197

2 %

Numérique

92

23 %

1 603

19 %

Photographie

18

5 %

202

2 %

Publicité

67

17 %

596

7 %

Total

400

100 %

8 365

100 %

Conception/fabrication

321

80 %

5 678

68 %

Diffusion

79

20 %

2 687

32 %

Famille

la méthode

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Une HISTOIRE QUI S’ÉCRIT EN MARCHANT

Une HISTOIRE QUI S’ÉCRIT EN MARCHANT

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Une histoire qui s’écrit en marchant Jean Blaise, Directeur du Voyage à Nantes, créateur des Allumées L’Île de Nantes, au lendemain de la fermeture des chantiers navals, était pour nous un terrain de mystère et d’aventure. Une ville oubliée et abandonnée, presque un décor de bande dessinée. Notre idée en créant en 1990 un festival nocturne et nomade, Les Allumées, était de faire aimer la ville avec ses qualités et ses défauts. Les friches industrielles en faisaient évidemment partie. Quand on a vu, lors de la première édition, la traînée de fourmis qui franchissait les ponts sur la Loire pour se rendre à La Fabrique de glace, sur l’Île de Nantes, on s’est dit que c’était gagné. C’est vrai qu’il fallait aller le chercher ce lieu, mais cette manière d’investir l’espace est un peu dans nos gènes. Il y a une particularité à Nantes  : on conçoit l’action culturelle autrement que dans la plupart des villes de France. Ici pas de boîte noire où la culture serait enfermée. C’est très important dans la psychologie d’une ville de concevoir l’art dans l’espace public, c’est extrêmement fort sur l’ambiance. C’est ce qui a permis l’intrusion de créateurs, d’artistes sur l’île, avec les prolongements qui se sont fait jour progressivement, les Machines, la Fabrique… On boucle la boucle avec le Voyage à Nantes, dont la star est la ville.

La colonisation spontanée des friches industrielles par de jeunes créateurs peu fortunés à la recherche de grands volumes n’est pas spécifique à Nantes. Le phénomène s’est produit dans un grand nombre de villes industrielles lorsque les usines ont cessé leurs activités ou déserté les centres urbains pour s’installer en périphérie. La caractéristique de Nantes est la concentration de ces

L’histoire de ce quartier s’est écrite en marchant, par tâtonnements successifs

friches sur un grand site, situé face au centre-ville, où a régné pendant plus d’un siècle une mono-industrie  : la construction navale. Le phénomène s’est également produit, à plus petite échelle, dans un ancien quartier d’entrepôts, les Olivettes, où se déploient aujourd’hui des activités créatives, moins gourmandes en espace. Mais le «  cœur du réacteur  » se situe sur l’Île de Nantes, dans ce qu’il est désormais convenu d’appeler le Quartier de la création. Il

aura fallu une vingtaine d’années pour que ce quartier prenne forme et il en faudra sans doute encore une dizaine pour que tous les éléments du puzzle se mettent en place. L’histoire de ce quartier s’est écrite en marchant, par tâtonnements successifs. Elle est le fruit d’un contexte urbain, d’une culture locale et d’une intelligence collective qui ont su se conjuguer au bon moment, au bon endroit. «  Un cercle vertueux magique  » comme le qualifie Pierre Oréfice, le directeur des Machines de l’île, qui fut l’un des premiers occupants, au début des années 90, des hangars délaissés par les chantiers navals avec la compagnie Royal de Luxe. Durant une dizaine d’années en effet, alors que la puissance publique réfléchissait à l’urbanisation de l’Île de Nantes, les friches industrielles issues de la construction navale ont été laissées à l’usage d’artistes et de créateurs, qui ont ainsi disposé de locaux immenses pour y déployer leur inventivité. Les Nantais y venaient épisodiquement pour assister à une pièce de théâtre ou participer au déploiement d’un festival nocturne de belle mémoire « Les Allumées. » Lorsqu’il s’est agi, au début des années 2000 de passer aux choses sérieuses, d’urbaniser le quartier,

le parti a été pris de respecter le bâti existant, de conserver les traces du passé industriel, comme en témoignent les rails qui strient encore la voierie, mais aussi de préserver et de faire prospérer le fragile écosystème créatif qui s’était installé spontanément sur les lieux. L’aménageur, la Samoa, a ainsi ouvert aux jeunes créateurs de nouveaux espaces dans les immenses halles Alstom qu’elle avait décidé d’acquérir. L’une des idées de départ, comme le confie Laurent Théry, le fondateur de la Samoa, était de proposer aux nouveaux médias qui apparaissaient (deux télévisions et une radio) de vastes locaux pour y installer leurs studios. Mais rapidement d’autres activités créatives se sont greffées – allant de l’édition à l’artisanat d’art – sans que les choses soient organisées de façon formelle. Pas de moyens communs, pas d’accompagnement de la collectivité, il ne s’agissait pas d’une pépinière d’entreprises, mais d’une sorte d’auberge espagnole, où chacun était invité à tirer le meilleur parti de cette opportunité de localisation.

Une HISTOIRE QUI S’ÉCRIT EN MARCHANT

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Affinites électives

Jean-Luc Courcoult Royal de Luxe Nantes, pour moi, c’est avant tout un public, qui démarre au quart de tour sur l’humour. Il a tout de suite eu le feeling, compris la poésie de nos histoires. J’aime ce rapport populaire que l’on a développé avec les Nantais. Nos premiers ateliers étaient installés sur l’île, dans un immense hangar des ateliers Dubigeon, une cathédrale de métal. On fabriquait dans le froid, c’était dantesque. J’habitais à l’époque dans un autobus garé à côté du hangar. Ce lieu, quasi désert à l’époque, nous convenait bien parce qu’on a toujours cultivé le désir de garder le secret sur nos créations. Le soir, on finissait au Saint-Domingue, au bout de l’île, devant des poulets grillés. Il y a toujours eu des machines dans nos spectacles, elles leur donnent une certaine âme. Dans ce monde post-industriel les machines sont presque des personnages. Et pour les réaliser, pour travailler les matières, on fait appel à tous les corps de métiers. Au début tout le monde faisait un peu tout, on mettait en oeuvre des matériaux de récupération. Beaucoup de gens sont passés au Royal de Luxe, qui volent désormais de leurs propres ailes, et pour certains ont créé leur propres compagnies. On rayonne sans le vouloir, à travers le travail. Maintenant, en raison des contraintes, on travaille aussi avec des techniciens extrêmement pointus, des ingénieurs qui calculent sur plans, qui étudient la résistance des matériaux. Mais nous montrons toujours l’envers du décor, il n’y a pas de rideau, comme au théâtre. Et nous nos spectacles se déroulent en pleine lumière, ils ont quelque chose de crû.

Dans le même temps se préparait l’implantation de l’école d’architecture, prévue depuis plusieurs années sur l’île et germait l’idée de regrouper les formations artistiques sur le site. L’idée d’un « campus des arts » était évoquée. Professionnels, praticiens et diffuseurs des musiques actuelles réfléchissaient, de leur côté, à la création de nouveaux outils – studios d’enregistrement, salle de spectacle – adaptés à l’évolution des pratiques musicales. Mais si l’urbaniste en charge de l’aménagement de l’île, Alexandre Chemetoff, et l’aménageur, représentant la puissance publique, commençaient à imaginer une couleur au quartier en train de prendre forme, aucun projet global n’était pré-écrit. Il s’agissait d’accompagner un mouvement et non de l’encadrer. Il fallait, en quelque sorte, observer l’évolution d’un écosystème fondé sur des affinités électives, sans en entraver le développement. Une préoccupation toutefois : réserver une large place à l’enseignement supérieur et à la recherche, pour donner vie et irriguer ce quartier en cours d’aménagement. Le projet de déménagement de l’école des Beaux-arts a ainsi été accueilli à bras ouverts au milieu de la décennie. Les choses se sont accélérées lors de la préparation de la première édition de la biennale d’art contemporain « Estuaire ». En choisissant la pointe occidentale de l’Île de Nantes comme centre névralgique de cette biennale appelée à se déployer sur l’ensemble de l’estuaire de la Loire, l’organisateur, Jean Blaise, a pressé le mouvement qui se faisait jour sur l’île, mobilisé les acteurs et impliqué l’aménageur. La mise en lumière de l’architecture métallique des anciennes nefs Dubigeon, appelées à accueillir les Machines de l’île et le grand éléphant pour le lancement d’Estuaire en 2007, l’installation des anneaux de Buren, l’aménagement du Hangar à bananes, ont ainsi donné en quelques mois une couleur et une lisibilité nouvelles au quartier, lui conférant une place à part dans l’imaginaire local, à la croisée de son passé industriel et d’une singularité culturelle à laquelle les Nantais ont spontanément adhéré.

Une HISTOIRE QUI S’ÉCRIT EN MARCHANT

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Nantes, la mobilisation des acteurs publics La curiosité bienveillante à l’égard de la nouveauté est une particularité et une force de la culture locale. Nantes fut longtemps un grand port, une porte d’entrée du pays, soumis à de multiples influences, une terre d’accueil qui a su faire prospérer les initiatives, d’où qu’elles viennent. Place d’échanges plus que ville industrielle – même si la construction navale et l’industrie agro-alimentaire ont longtemps occupé une place de premier plan dans l’économie locale – la ville a toujours conservé un tissu économique diversifié, qui s’est constamment renouvelé. Un bel exemple est la reconversion des fonderies, à la fin du XIXème, qui, faute de commandes, ont réalisé de monumentales œuvres d’art pour l’exposition universelle de 1878, au nombre desquelles figure le rhinocéros de fonte qui trône aujourd’hui sur le parvis du musée d’Orsay à Paris. C’est cette capacité de rebond, ce pragmatisme qui ont permis à la Cité des ducs de ne pas sombrer dans le marasme au lendemain de la fermeture des chantiers navals en 1987. Ce pragmatisme vaut également pour la puissance publique, qui a su ces dernières décennies, dépasser les clivages politiques pour accompagner le rebond économique de la ville, de la métropole et de la région, et qui a permis de muscler l’enseignement supérieur et de la recherche dans une région qui souffrait d’un déficit chronique en la matière. La création du pôle de compétitivité EMC2 puis de l’IRT (Institut de recherche technologique) Jules

Verne sont des illustrations de la capacité de tous les acteurs du territoire à se mobiliser pour anticiper les évolutions technologiques, se donner les moyens de dépasser les crises. Pour autant, si la pertinence d’accompagner le développement de nouvelles technologies n’était contestée par personne, il n’était pas intellectuellement évident d’adhérer à un projet de développement d’industries culturelles et créatives, qui s’inscrivent dans une logique économique inédite, à la croisée de deux mondes. C’est pourtant ce qu’ont fait l’ensemble des collectivités territoriales, en accompagnant sur l’Île de Nantes l’émergence du Quartier de la création. Elles ont ainsi encouragé, en partenariat avec l’État, l’implantation de grandes écoles nationales et localisé sur le site de grands équipements, à l’image de La Fabrique, un complexe de développement et d’initiatives artistiques, tourné vers les nouvelles pratiques numériques. «  Le positionnement retenu est atypique, il s’agit d’un cluster transdisciplinaire, qui privilégie une très grande mixité, une très grande diversité » explique Jean-Luc Charles, le directeur de la Samoa lorsqu’il évoque le Quartier de la création en cours de constitution. «  Il témoigne d’une caractéristique nantaise  : une grande réactivité, puisqu’en dix ans, entre 2008 et 2017, vont se concentrer sur l’Île de Nantes, un pôle de recherche, d’enseignement supérieur et d’activités créatives regrou-

Saint-Nazaire, ville du « faire »

pant plusieurs milliers d’acteurs.» Outre les entreprises créatives, de nombreuses formations supérieures sont en effet installées ou en cours d’implantation, parmi lesquelles

la ville a toujours conservé un tissu économique diversifié, qui s’est constamment renouvelé. on trouvera à terme des écoles d’architecture, d’arts graphiques, de communication, de beaux-arts, de design ainsi qu’un département de l’Université tourné vers les nouvelles technologies. Le cœur physique de ce quartier se trouvera dans les anciennes halles industrielles Alstom, où va s’installer une plate-forme de recherche et de formation, avec l’école des Beaux-arts et l’Université, un plateau réservé aux entreprises créatives, accueillant notamment la cantine numérique, une plate-forme d’animation chargée d’assurer l’interface entre les acteurs, et de grands volumes «  sans qualités  » dédiés à des activités éphémères, workshops ou expositions temporaires.

À Saint-Nazaire, terre d’ingénieurs et de techniciens, c’est une logique différente qui est à l’œuvre, même si la culture a contribué à la recomposition urbaine, à travers l’accueil en résidence d’artistes, de plasticiens, de musiciens, de compagnies de théâtre, de chorégraphes, d’écrivains étrangers… dans des lieux dédiés. Des passerelles commencent ainsi à se dessiner entre le monde de la création et celui de l’industrie. À titre d’exemple, l’entreprise Tabisso met en lien le savoir-faire des sous-traitants des industries navale et aéronautique au service du mobilier haut de gamme. Pas d’encadrement formel pour l’heure, les choses se font à l’abri des bureaux d’études et des ateliers dans cet univers du « faire » où l’on préfère expérimenter que s’exposer. Une chose est sûre toutefois, le terrain est extrêmement fertile dans cette ville nouvelle, tournée depuis sa création vers l’innovation technique, familière de la culture du prototype et industriellement armée comme peu de bassins d’emplois en France pour faire face aux mutations qui se profilent, notamment dans le domaine de l’économie maritime. On l’oublie trop souvent, le bassin de Saint-Nazaire n’est pas seulement reconnu dans le monde entier pour son savoir-faire en matière d’assemblage de gros ensembles mécanosoudés et composites complexes, bateaux, avions, moteurs, éoliennes, véhicules spéciaux…, mais doit sa position sur le marché international des industries navale et aéronautique à la qualité de son tissu d’entreprises spécialisées, notamment dans l’agencement de luxe. Cette «  french touch  » qui lui vaut, avec les Italiens, la confiance des armateurs américains, exige une réactivité, une inventivité et une singularité créative qui doivent, en permanence, se renouveler. Le fait que créateurs et ingénieurs utilisent désormais le même type d’outils autorise des perspectives de collaboration jusqu’alors inexplorées. Le centre industriel de réalité virtuelle de Montoir-de-Bretagne, qui ouvre ses portes en 2014, sera, en quelque sorte, le premier étage de la fusée qui doit permettre de faire dialoguer et de faire travailler ensemble des professionnels issus d’univers différents, qu’ils soient architectes, artistes ou ingénieurs. La mutation technologique qui se profile en direction des énergies marines renouvelables, que l’on peut rapprocher de la mutation qui s’était produite à Saint-Nazaire dans la première moitié du XXème siècle avec la diversification de l’industrie navale dans l’aéronautique, est également une opportunité historique pour le bassin de Saint-Nazaire. Elle ne va pas seulement mobiliser toute l’ingéniosité de la place industrielle  : «  Il y a aussi des enjeux écologiques, esthétiques  » explique Patrick Pirrat, expert industriel aux chantiers STX «  qui devront être relevés en faisant appel à des compétences nouvelles». Une étude de faisabilité dans une grande halle à la charnière entre la ville et le port a montré qu’une plateforme de collaboration, inspirée de l’expérience nantaise des halles Alstom et du Karting, où sont regroupées une cinquantaine d’entreprises créatives, pouvait être un outil précieux dans cette perspective. Friches portuaires ou urbaines, le choix n’est pas arrêté mais un lieu favorisant les échanges devrait, quoi qu’il en soit, voir le jour prochainement.

Une HISTOIRE QUI S’ÉCRIT EN MARCHANT

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Ebullition permanente L’enjeu est de taille, comme le montre ce premier observatoire des filières culturelles et créatives, qui met pour la première fois en lumière le poids réel de ce pan de l’économie, jusqu’alors mal identifié. Il s’agit

Plus la ville reconquiert les friches industrielles plus la pression immobilière se fait forte, et plus le risque de gentrification est grand, au détriment des jeunes créateurs. à la fois de consolider les filières créatives existantes, comme le design et le numérique, de régénérer certaines filières traditionnelles, comme la mode et le meuble, et d’accompagner l’émergence de nouvelles activités, de nouveaux métiers, qui apparaissent chaque année, à l’image de l’impression en trois dimensions. L’accompagnement n’est pas simple

dans des secteurs en mouvement permanent, au carrefour d’univers qui n’ont pas toujours de langage commun, voire d’objectifs communs. La création ne se décrète pas, elle a besoin d’une grande liberté d’action pour se déployer. Il faut savoir accompagner sans contraindre, animer sans encadrer. La recomposition urbaine pose par ailleurs des problèmes d’occupation de l’espace. Plus la ville reconquiert les friches industrielles plus la pression immobilière se fait forte, et plus le risque de gentrification est grand, au détriment des jeunes créateurs. Les conditions d’accueil doivent donc rester souples, au besoin provisoires, dans tous les cas adaptables. Le débat a été long, parfois passionné, lors de la conception puis de la mise en forme de ce premier observatoire des filières culturelles et créatives. Difficile en effet d’appliquer une méthode scientifique, la plus rigoureuse possible, dans un univers où le vocabulaire n’est pas fixé, où les critères varient en fonction de la culture, de la géographie, de l’approche économique.

La création ne se décrète pas, elle a besoin d’une grande liberté d’action pour se déployer. C’est la raison pour laquelle une place de choix a été dévolue à la méthode, de sorte que le terrain soit bien balisé. Et si les critères sur lesquels s’appuie cette méthode sont clairement énoncés, d’autres approches sont également évoquées, des comparaisons esquissées, pour prendre acte du fait que la définition et le champ des industries culturelles et créatives ne sont pas stabilisés. Elles n’en sont pas moins, pour autant, une réalité tangible.

Une HISTOIRE QUI S’ÉCRIT EN MARCHANT

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L’état des lieux

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L’ÉTAT des LIEUX

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

36 400 emplois privés dans les filières culturelles et créatives

La métropole Nantes Saint-Nazaire comptabilise 36 400 emplois privés8 dans les filières culturelles et créatives pour 8 400 établissements en 2012. Cela représente 9 % de l’emploi métropolitain et 12 % des établissements. La filière numérique regroupe 13 400 emplois, la filière mode et accessoires 7 600 emplois et la filière publicité 3 700 emplois. 25 700 emplois relèvent d’activités de création et de production, 10 700 de la diffusion (notamment intermédiaires et commerces de détail). C’est dans la mode et le meuble que les emplois liés à la diffusion sont les plus nombreux.

Nombre d’emplois dans les industries culturelles et créatives en 2012 et évolution 2007 - 2012 en Loire-Atlantique Soulvache

Ille et Vilaine

Sophie Levionnois Directrice du Centre industriel de réalité virtuelle

Sion-les-Mines

Morbihan Saint-Nicolas-de-Redon

Il me semble que la créativité émerge d’un croisement de points de vue. Je crois beaucoup à la rencontre entre le monde des ingénieurs et celui des arts numériques, même s’il ne faut pas se voiler la face : les deux mondes ont des réticences l’un par rapport à l’autre. D’un côté les artistes du XXIème siècle semblent arrivés au bout d’une approche autocentrée de la production artistique, et ressentent le besoin de s’inspirer des univers professionnels, notamment techniques, de l’autre les industriels ont une préoccupation principale  : rendre plus compétitives leurs usines. Pour ces derniers, le lien à l’esthétique n’existe que dans la chaîne amont, au moment du design. Pourtant, les technologies utilisées sont aujourd’hui les mêmes. La réalité virtuelle augmente les sens, les détourne, elle permet de sauter dans un dessin, de s’immerger dans un modèle. Airbus l’utilise pour valider l’ergonomie des postes d’opérateurs. Les architectes, qui ont une sensibilité plus artistique, s’en emparent progressivement pour concevoir les bâtiments. Mais on est loin d’avoir fait le tour des usages, de l’utilisation de ces nouveaux moyens. Pour cela il faut bousculer certaines habitudes, certains usages, provoquer certains frottements. C’est le cas autour de «  L’usine du futur  », le grand thème de l’IRT Jules Verne, sur lequel nous allons, avec la récente PRI (plateforme régionale d’innovation) Design’In faire plancher des jeunes gens. Il s’agit d’inventer l’usine de demain. Nous allons pouvoir observer comment ils l’imaginent même si c’est allégorique.

Saint-Molf

Piriac-sur-Mer

Saint-Lyphard

Saint-Joachim

Saint-Julien-de-Vouvantes

Guérande

Saint-André-des-Eaux

Quilly

Abbaretz

Fay-de-Bretagne Savenay

La Chapelle-

Malville

Launay Lavau-

Le Templede-Bretagne Bouée

Cordemais

Paimboeuf

Saint-Brevin-les-Pins

Frossay

sur-Erdre Sautron

Vue

Saint-Michel-Chef-Chef Chauvé

Arthon-en-Retz

Couëron

Le Pellerin

Rouans

Petit-Mars

Orvault

Maumusson Pouillé-lesCoteaux La Roche- La Rouxière Blanche Mésanger

Ligné Couffe

Saint-Marsdu-Désert

Oudon

Saint-Herblon Ancenis SaintGéréon

Belligné La ChapelleSaint-Sauveur Varades

Anetz

Le Fresnesur-Loire Montrelais

Mauve- Le Cellier

Vigneux-de-Bretagne Trellières La Chapelle-

de-Montluc

Saint-Père-en-Retz

La Plaine-sur-Mer

Casson Notre-Damedes-Landes Grandchamp-des-Fontaines Sucé-sur-Erdre

Saint-EtienneSaint-Viaud

Teille Mouzeil

Héric

Vritz

Saint-Mars-la-Jaille Bonnoeuvre Pannecé

Trans-Sur-Erdre Les Touches

Nort-sur-Erdre

Corsept

Préfailles

Riaillé

Saffré

La Chevalleraie

Bouvron

Prinquiau

sur-Loire

Pornichet

La Grigonnais Puceul

Blain

Campbon

Donges

Saint-Nazaire Le Pouliguen

Le Gavre

La Chapelle-Glain

Le Pin Grand-Auverné Saint-Sulpice-des-Landes

La MeillerayedeBretagne

sur-Brivet

Besné

Trignac Montoir-de-Bretagne

La Baule

Petit-Auverné

Nozay

Guenrouet

Saint-Anne-

Saint-Malo-de-Guersac

Batz-sur-Mer

Moisdon-La-Rivière

Issé

Treffieux Marsac-sur-Don Plessé

Crossac

La Turballe

Le Croisic

Erbray

Joué-sur-Erdre

Sainte-ReineHerbignac La Chapelle- de-Bretagne des-Marais Pont-Château

Assérac Mesquer

Juigné-des-Moutiers

Louisfert Saint-Vincent-des-Landes

Derval

Vay

Drefféac

Soudan

Châteaubriant

Jans

Fegréac

Missillac

E S

Saint-Aubin-des-Châteaux

Guémené-Penfao

Sévérac

Saint-Gildas-des-Bois

Noyal-sur-Brutz Villepot

Lusanger Conquereuil

Avessac

N O

Mouais

Pierric

Massérac

Mayenne

Fercé Rouge

Ruffigne

Carquefou

Sources Insee, Acoss, traitement Auran Addrn

sur-

Loire Thouaré-La Chapelle-Basse-Mer Barbechat sur-Loire Saint-Luce- Saint-Julien-

Maine-et-Loire

sur-Loire de-Concelles La boissièreLe Loroux-Bottereau La Remaudière du-Doré BasseSaint-Sebastien-Goulaine Le Landreau sur-Loire Haute-Goulaine

SaintHerblain

Nantes

Saint-Jeande-Boiseau Indre Cheix-en-Retz BrainsLa Montagne

7 %

Rezé

Bouguenais La Regrippière La Haie- La ChapelleVallet Vertou Bouaye Fouassière Heulin Saint-LégerPort-Saint-Père les-Vignes Saint-AignanLes Sorinières Saint-Fiacre-sur-Maine Le Pallet de-Grand-Lieu Mouzillon Pont-Saint-Martin Maisdon-Monnières Château-Thébaud Saint-Hilaire-de-Chaléons sur-Sèvre La Bernerie-en-Retz Gorges Le Bignon Sainte-Pazanne Clisson Saint-Lumine La Chevrolière Les Moutiers-en-Retz Saint-Mars-de-Coutais Aigrefeuille--de-Clisson Gétigné Montbert sur-Maine Saint-LumineSaint-PhilbertSaint-Hilaire Geneston Bourgneuf-en-Retz de-Coutais de-Grand-Lieu -de-Clisson Boussay Fresnay-en-Retz Remouillé Saint-Colomban Saint-Même-Le-Tenu

Pornic

Répartition des emplois privés estimés par filières en 2012

Cheméré

3 %

7 % 37 % 8 %

La Planche La Marne

Machecoul

5 %

La Limouzinère Vieillevigne

Paulx Corcoué-sur-Logne Saint-Etienne-de-Mer-Morte

0

5

10

Vendée

20 Km

Sources : Acoss - Urssaf 2007 - 2012 BD Carto® ©IGN Paris 2006 - Licence n°7656 Cartographie : ADDRN - Février 2014

Touvois Legé

Évolution en nombre baisse de plus de 50 emplois

entre 0 et +25 emplois

entre +50 et +100 emplois

entre -50 et -25 emplois entre -25 et 0 emplois

entre +25 et +50 emplois

hausse de plus de 100 emplois

Nombre d’emplois en 2012

50 150

500

1000

La métropole Nantes Saint-Nazaire comptabilise 36 400 emplois privés8 dans les filières culturelles et créatives

8

1 %

10 %

0,3 %

21 % 1 % Numérique Information Mode Photographie Publicité Design Produits culturels non reproductibles Musique, audiovisuel, radio Meuble Livre Architecture

 es chiffres d’emplois relèvent de l’estimation suivante : addition de l’emploi salarié privé (source Acoss) et des L établissements de 0 salariés (source Insee). Le volume réel d’emplois est sous-estimé car l’emploi public n’est pas comptabilisé. Dans les évolutions, seuls les emplois salariés privés sont pris en compte.

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L’état des lieux

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Les filières ne sont pas réparties de la même manière entre Nantes et Saint-Nazaire. La structure du tissu économique nantais est dominée par le numérique, qui pèse près de 40 % de l’emploi, la mode, les produits culturels non reproductibles et les services créatifs, en particulier la publicité et l'architecture. La structure du tissu économique nazairien est en revanche dominée par la mode, qui est plus particulièrement concentrée dans la diffusion, les services créatifs, notamment la publicité et le design, et le meuble. Fait notable, la filière numérique est peu pourvoyeuse d’emplois à Saint-Nazaire, même si de nombreux bureaux d’études et d’ingénierie des grandes entreprises industrielles ont recours aux solutions numériques. En outre, de petites start-up positionnées sur des créneaux innovants émergent depuis quelques mois, en particulier dans la pépinière nazairienne.

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Une croissance forte depuis 20 ans Les filières culturelles et créatives de la métropole Nantes Saint-Nazaire ont enregistré une croissance globale de 63 % de l'emploi salarié privé entre 1993 et 2010. Elle est très nettement supérieure à celle de l'ensemble des filières économiques (+51 %). Après un développement soutenu jusqu’en 2001, cette hausse a été impactée par les effets de l’éclatement de la « bulle Internet ». Une nouvelle phase de croissance est intervenue entre 2005 et 2008, avant de ralentir sous l’effet de la crise. Le recul à l’échelle des Pays de la Loire s’explique surtout par les pertes d’emplois massives dans la mode et dans le meuble. La croissance depuis 1993 a été tirée par le numérique, porté par le dynamisme de petites start-up et d’importantes SSII (sociétés de services d’informatique et d’ingénierie), les produits culturels non reproductibles et les services créatifs, notamment l’architecture, la publicité et le design. Les filières mode et accessoires, livre et surtout photographie ont en revanche subi des pertes d’emplois sur 15 ans, traduisant pour certaines de profonds changements de modèle économique et pour d’autres une concurrence internationale particulièrement rude.

Évolution de l’emploi salarié privé dans les industries culturelles et créatives entre 1993 et 2010 Source Pôle emploi, traitement Auran Addrn

Parallèlement à l’emploi, 1 900 établissements se sont créés dans les filières culturelles et créatives sur Nantes et Saint-Nazaire en 2012, dont 69 % sur Nantes Métropole. Ces nouvelles entreprises représentent 18 % de l’ensemble des créations d’établissements, ce qui est largement supérieur au poids des filières culturelles et créatives dans l’ensemble de l’économie de Nantes SaintNazaire (12 % des établissements). Ces créations d’établissements concernent essentiellement le numérique (23 %) et la mode (21 %), mais aussi les produits culturels non reproductibles (13 %), le design (12 %), et l’architecture (8 %). 18 % d’entre elles sont liées à la distribution/ diffusion. On observe que la plupart des filières culturelles et créatives affichent un taux de création supérieur à la moyenne du tissu local (14 %). Les taux les plus élevés se rencontrent dans le design (53 %), les produits culturels non reproductibles (34 %), le numérique (28 %) et la photographie (37 %). Paradoxalement, ce dernier chiffre traduit davantage la crise de la photographie que son dynamisme, les créateurs d’entreprise essayant d’assurer leur propre emploi. Le nombre de créations d’établissements progresse sensiblement à partir de 2009, comme dans le reste de l’économie, en raison de l’impact du statut d’auto-entrepreneur. Il est à noter une dynamique plus soutenue de la création d’établissements dans les filières culturelles et créatives que dans l’ensemble des filières à partir de 2009. Elle est notamment portée par les services créatifs, le numérique, les produits culturels non reproductibles et le livre.

Évolution relative des créations d’établissements dans les filières culturelles et créatives sur les aires urbaines fonctionnelles de Nantes et Saint-Nazaire (base 100 en 2003) Source : Insee, traitement Auran, Addrn

Par territoire

100%

Par filière 300

Aire urbaine Aire urbaine Aire urbaine fonctionnelle fonctionnelle fonctionnelle Nantes Pays Saint-Nazaire Saint-Nazaire de la Loire Nantes +35% +39% +55% +66% +51% +63% +38%

Photographie 0% +28% +43% +63% +76% +102% +107% +298% +443% 500%

90%

Livre Mode et accessoires

80%

250

200

Information 400%

70%

Meuble

60%

Musique, audiovisuel, radio

300%

50%

150

100

Filières culturelles et créatives

40% 200%

30%

Publicité

20%

Architecture

10%

100%

-10%

-100%

-20%

-12% Ensemble des secteurs

Filières culturelles et créatives

-60% -25% -5%

50

0

Produits culturels non reproductibles

2003

Design

Ensemble de l’économie

Numérique

2005

2007

2009

2010

Filières culturelles et créatives

2011

2012

L’état des lieux

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

L’impact mesuré de la crise Entre 2007 et 2012, la croissance de l'emploi salarié privé dans les filières culturelles et créatives s’est élevée à 15 % sur les aires urbaines fonctionnelles de Nantes et Saint-Nazaire. Cette hausse s'est avérée plus soutenue que celle de l'ensemble des filières de la métropole (+5 %).

Ludovic Simon Cofondateur d’Atlantic 2.0 Je crois beaucoup au fait de mélanger des artistes, des étudiants, des entrepreneurs dans un shaker. Un artiste utilise aujourd’hui les mêmes outils qu’un développeur web ou qu’un « maker », un bricoleur du XXIème siècle. Ce sont des gens qui se ressemblent, qui utilisent les mêmes technologies et qui ne se croisent pas assez souvent. L’innovation ça ne se prévoit pas, ça se provoque et le hasard compte beaucoup. J’ai hâte d’être sur l’Île de Nantes et que le projet mûrisse. Le fait d’être proche de l’école de design, d’avoir un fablab à proximité est très excitant, très positif. Créer des choses improbables dans des lieux improbables, croiser les disciplines donnera forcément quelque chose. C’est complètement dans la tendance de la nouvelle génération. Et il y a une grosse énergie dans ce cluster. Nantes me semble avoir pris le bon parti en privilégiant un urbanisme audacieux. On nous donne un quartier tout neuf, un énorme laboratoire, qui sera un quartier jeune, plein d’étudiants, avec un état d’esprit nouveau. La situation de la ville est idéale  : on peut arroser tout l’Ouest et aller à Paris facilement. En jouant tous ensemble on peut avoir un rayonnement international. Pour autant, il ne faut pas en faire trop dans l’accompagnement. Il faut que cela reste un joyeux bordel. Il ne manque plus que des cafés, des endroits pour se croiser le soir. De la vie, quoi.

Les filières design (+85 %), numérique (+37 %), publicité (+18 %) et information (+15 %) ont enregistré une croissance supérieure à la moyenne des filières culturelles et créatives, témoignant d’une bonne résistance à la crise. Les filières du livre (-20 %) et de la photographie (-29 %) ont a contrario fait face à des diminutions conséquentes de l’emploi, confirmant leur déclin. Elles ont été rejointes par les filières musique, audiovisuel, cinéma et meuble, qui sont en partie touchées par les nouveaux modes de consommation liés au développement du numérique. Les turbulences de la construction navale se sont également fait ressentir pour les agenceurs d’intérieur nazairiens. Parallèlement à l’emploi, malgré le contexte de crise, le nombre d’établissements a augmenté de 27 % entre 2009 et 2012, soit une progression largement supérieure à la moyenne du tissu local (+9 %). Elle s’est avérée spectaculaire dans le design (+553 %), et particulièrement soutenue dans le numérique (+44 %), les produits culturels non reproductibles (+51 %) et la photographie (+51 %) dont le déclin se poursuit. Seules les filières de l’information et du livre enregistrent des évolutions négatives.

Évolution de l’emploi salarié privé dans les industries culturelles et créatives entre 2007 et 2012 Source Acoss, traitement Auran Addrn

par filière

par territoire Aire urbaine Aire urbaine Aire urbaine fonctionnelle Nantes Pays fonctionnelle fonctionnelle Saint-Nazaire de la Loire Nantes Saint-Nazaire +1%

+20%

+5% +15%

+4% +14%

+1,3%

+7%

+11% +14% +17% +18% +37% +85%

+100%

+80%

+15%

+60%

+10%

+40%

+5%

+20%

0%

0% -20%

-5%

-2%

-0% -0% -40%

-23% -20% -11% -1,8%

Ensemble des secteurs Filières culturelles et créatives

Voir légende p.40

L’état des lieux

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Des entreprises en développement Le « spillover », un remède anti-crise ? Le spillover est une notion qui décrit l’impact du développement des industries créatives sur le reste de l’économie. Souvent qualifié «  d’externalité positive  » par les économistes, il y a « spillover » lorsque les biens ou services produits par une entreprise ont un effet positif en son sein, mais également lorsque que ces effets débordent sur d’autres sociétés et/ou l’ensemble de l’économie. Certains sous-secteurs créatifs sont reconnus pour ce potentiel de débordement. C’est le cas du design ou du tourisme culturel. Ce terme technique renvoie plus largement à une transfor-

9 10

mation radicale des produits du capitalisme qui intègrent, et de plus en plus, des valeurs esthétiques. Selon les mots de Gilles Lipovetsky et Jean Serroy9 nous sommes entrés dans l’âge du «  capitalisme artiste  » et notre consommation quotidienne «  a basculé dans l’ordre transesthétique  ». Les mondes esthétiques ne sont plus des «  petits mondes » à part mais un secteur créateur de valeur économique. De nombreux auteurs10 pointent l’impact grandissant qu’auraient les arts visuels et les arts vivants comme générateurs de spillover. Certaines agences se sont même

positionnées comme créatrices de lien pour faciliter les collaborations entre «  créatifs  » et industries traditionnelles. C’est le cas au Pays basque espagnol de l’Agence Conexionnes Improbables qui, par exemple, mobilise des danseurs pour revisiter l’agencement d’espace de travail dans l’entreprise. En Suède, c’est TILLT qui aide à la production d’intervention artistique dans des organisations.

Lipovetsky G., Serroy J. (2013) L’esthétisation du monde, Vivre à l'âge du capitalisme artiste, Paris, Gallimard, 496 p.  AKLEY K., SPERRY B., PRATT A., (2008) The Art of Innovation: How fine arts graduates contribute to innovation, O NESTA Edited by Hasan Bakshi, 86 p

Sébastien Maitre, Chef d’entreprise, TABISSO L’aventure TABISSO - design et édition de mobilier contemporain haut de gamme pour les marchés professionnels - était irréalisable ex-nihilo. Il nous fallait un écosystème sur lequel nous greffer, un réseau de sous-traitants qualifiés, en mesure de proposer des finitions, un rendu parfaits. C’est le cas à Saint-Nazaire avec les entreprises qui travaillent pour STX ou Airbus. Il faut des gens qui savent réaliser de la sellerie, mettre en œuvre la mousse, le bois, le métal… Nous sommes sur un marché très spécifique, très exigeant, qui demande une grande réactivité, un savoir-faire exemplaire. Pas des sous-traitants qui appliquent aveuglément un cahier des charges, mais des partenaires qui peuvent faire valoir leur expertise. Nous sommes un peu des chefs d’orchestre, notre travail consiste essentiellement à gérer des projets, pour une clientèle à 80 % étrangère. Nous sommes des fabricants qui faisons fabriquer. Tout est atomisé. La proximité est très importante dans ce schéma. Et en Loire-Atlantique l’écosystème est double : à Nantes il y a les services, à Saint-Nazaire l’industrie et la fabrication. Je suis Suisse et j’ai longtemps travaillé à l’étranger, entre Johannesburg, Hong-Kong et Londres, et j’ai choisi de m’installer à Saint-Nazaire. Il y a une belle énergie ici, une façon simple et directe de travailler. Il n’y pas de plafond de verre, rien n’est impossible. Il suffit de vouloir pour faire les choses. « Just do it ».

L’état des lieux

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Les entreprises consultées s’avèrent relativement pessimistes ou incertaines quant à leurs perspectives de développement. Près de la moitié des entreprises du livre et du meuble n’ont pas de visibilité à cinq ans, et un quart considèrent leurs perspectives comme faibles. Dans la mode, deux établissements sur cinq font part de difficultés à se projeter, même si la moitié estime pourtant disposer de perspectives moyennes ou fortes. Les entreprises du numérique ont en revanche plutôt confiance en l’avenir.

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Si on se penche plus avant sur le tissu économique local, parmi les 400 chefs d’entreprise interrogés, 70 % déclarent réaliser un chiffre d’affaires inférieur à 500 000 euros. Les entreprises liées à la distribution font état d’un chiffre d’affaires plus important que celles positionnées sur la conception et la fabrication dans la chaîne de valeur. Les établissements de la mode et du meuble sont en règle générale d’une taille plus importante que dans l’architecture, le numérique et les produits culturels non reproductibles. Ces deux derniers secteurs sont pour moitié composés d’entreprises réalisant un volume d’affaires de moins de 100 000 euros.

Chiffre d’affaires des entreprises enquêtées

Source : enquête menée en décembre 2013 auprès de 400 chefs d’entreprise des filières culturelles et créatives

Le numérique et le design ont été particulièrement dynamiques ces cinq dernières années malgré la crise. La moitié des entreprises interrogées affirment en effet que leur activité a connu une croissance régulière. Dans une moindre mesure, les filières livre, mode, publicité témoignent d’une activité en croissance ou stable. En revanche, le meuble et la photographie sont en perte de vitesse, la moitié des entreprises ayant connu un recul ou une activité instable.

Croissance enregistrée par les entreprises au cours des 5 dernières années

Source : enquête menée en décembre 2013 auprès de 400 chefs d’entreprise des filières culturelles et créatives

18 %

Une croissance continue 33 %

21 % 9 % 16 %

Moins de 100 000 euros 34 %

Une activité stable

28 %

35 %

Perspectives de développement pressenties dans les cinq prochaines années

Source : enquête menée en décembre 2013 auprès de 400 chefs d’entreprise des filières culturelles et créatives

Une activité en dents de scie

Entre 100 000 et 500 000 euros

Plus de 1 000 000 d’euros

29 %

Ne souhaite pas répondre

Parmi les 400 chefs d’entreprise interrogés, 33 % déclarent avoir connu ces 5 dernières années une croissance continue

Si l’on observe la situation par taille d’établissement, on constate que les entreprises unipersonnelles se plaignent d’un manque de temps pour se développer, alors que celles de plus de dix salariés mettent plus souvent en avant des difficultés à trouver une main d’œuvre adéquate. Les entreprises qui réalisent de petits chiffres d’affaires pointent une complexité à mobiliser des financements et à élargir leur rayonnement commercial.

Freins au développement déclarés par les dirigeants des entreprises interrogées Source : enquête menée en décembre 2013 auprès de 400 chefs d’entreprise des filières culturelles et créatives

Crise économique

Une activité en diminution

Entre 500 000 et 1 000 000 d’euros

6 %

Les très petites entreprises témoignent de leur inquiétude quant à leur développement, celles de plus de dix personnes envisagent plus sereinement l’avenir. Les plus assises, dont le chiffre d’affaires est compris entre 500 000 et 1 000 000 d’euros, comptent également se développer. Sans surprise, celles qui ont connu une croissance continue sur les cinq dernières années considèrent leurs perspectives de manière favorable, tandis que celles qui ont connu une activité instable ou en recul font part d’anticipations stables voire négatives.

Les principaux freins rencontrés sont liés à la conjoncture économique, à une fiscalité jugée trop lourde et à une concurrence perçue comme forte. Les filières de la publicité et des produits culturels non reproductibles, ainsi que le design et le numérique, invoquent aussi souvent des difficultés de financement, voire de recrutement pour ce dernier secteur.

17 %

22 %

32 %

Faible

Fortes

Moyennes

Ne sait pas

Fiscalité trop lourde Concurrence forte Difficultés à financer le développement de votre entreprise Difficultés à trouver des compétences adaptées à vos besoins Système fiscal complexe

36% 31% 26% 19%

11%

6%

Aucun

6%

Difficultés à élargir votre rayonnement commercial

5%

Soutien insuffisant des collectivités

5%

Manque de temps

5%

Clientèle limitée (marché de niche)

4%

Immobilier d’entreprises inadapté (coût, surface, contrat d’occupation...)

4%

Soutien mal ciblé de la part des collectivités

1%

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L’état des lieux

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Un VIVIER D’EMPLOIS

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Il y a des créatifs dans toute l’économie La créativité n’est pas le propre des filières culturelles et créatives. Un designer peut faire partie de l’effectif des chantiers navals, un webmaster peut être employé par une collectivité territoriale, établissements qui ne sont pas répertoriés dans les industries culturelles et créatives. Si l’on balaye le champ de l’économie locale, il y a plus de créatifs dans les autres filières qu’il n’y en a dans les filières proprement créatives. Globalement, considérant les choses sous cet angle, 74 200 emplois créatifs sont recensés à l’échelle métropolitaine dans l’ensemble de l’économie, soit environ 15 % des emplois du territoire. 86 % sont à Nantes et 14 % à Saint-Nazaire. Sur ces 74 200 emplois créatifs, 11 % font partie des professions artistiques (2 % de l’ensemble des actifs), 42 % des manipulateurs de symboles (6 % de l’ensemble des actifs), 43 % des innovateurs (6 % de l’ensemble des actifs), et 5 % des décideurs (1 % de l’ensemble des actifs). Un certain nombre des «  artistes  » sont employés par des associations, ou salariés de l’administration publique (professeurs notamment). Les chefs cuisiniers sont quant à eux, sans surprise, répertoriés dans la restau-

74 200

Source : Insee, traitement Auran, Addrn

emplois créatifs

ration traditionnelle. Même constat pour les « manipulateurs de symboles », qui sont très présents dans l’enseignement et les activités de conseil juridique et de gestion. À la différence des « artistes », ils sont beaucoup plus nombreux dans les activités qui ne relèvent pas des industries culturelles et créatives. Les « innovateurs » se retrouvent essentiellement dans les activités médicales, mais aussi dans le conseil (ingénierie et études techniques notamment). Fait notable, la construction navale emploie de nombreuses personnes appartenant à la catégorie des «  innovateurs  », et elle est avec l’aéronautique le premier secteur industriel de la métropole dans ce cas. Numériquement moins nombreux que les emplois des catégories précédentes, les « décideurs » se retrouvent dans de nombreuses filières non créatives du territoire, et plus particulièrement dans l’enseignement (chefs d’établissement).

Typologie des emplois créatifs sur les aires urbaines fonctionnelles de Nantes et de Saint-Nazaire Source : Insee (RP2009), traitement Auran, Addrn

2 %

Non créatifs Créatifs

6 % 85 %

Les secteurs d’activités qui emploient le plus de créatifs

15 %

Artistes 6 % 1 %

Manipulateurs de symboles Innovateurs

Autre imprimerie (labeur)* Activités de soutien au spectacle vivant* Restauration traditionnelle

Arts du spectacle vivant*

Enseignement secondaire Enseignement primaire général Enseignement Adm pub tutelle secondaire santé form cult technique ou & social (aut Les professionnel que sécu soc) dix secteurs

Autre création artistique*

Les dix secteurs d’activités dans lesquels les emplois créatifs de la famille « artistes » sont les plus présents

Autres organisations fonctionnant par adhésion volontaire Activités des agences de publicité*

d’activités dans lesquels les emplois créatifs de la famille « manipulateurs de symboles » sont les plus présents Conseil pour

Autres enseignements

les affaires et autres conseils de gestion Activités juridiques

Activités Activités de photographiques* pré-presse*

Conseil en systèmes et Activités logiciels infor- hospitalières matiques* Edition de Ingénierie, logiciels études applicatifs* techniques Les Tierce maintenance de systèmes et d’applications informatiques Pratique dentaire

dix secteurs d’activités dans Activité lesquels les emplois des médecins créatifs de la famille généralistes « innovateurs » sont les plus Recherche-déveprésents loppement : autres

Enseignement supérieur

Enseignement pré-primaire

Enseignement secondaire général Travaux de peinture et vitrerie Activités des sociétés holding

sciences physiques et naturelles Commerce de détail produits Construction pharmaceutiques de navires et (magasin de structures spécialisé) flottantes

Décideurs *Secteur d'activité appartenant aux filières culturelles et créatives.

Nettoyage courant des bâtiments

Formation continue d’adultes

Activités d’architecture*

Restauration traditionnelle Formation continue d’adultes

Les dix secteurs d’activités dans lesquels les Administraemplois créatifs de la tion publique famille « décideurs » générale sont les plus présents Enseignement secondaire technique ou professionnel

Adm pub tutelle Travaux de santé form cult menuiserie bois & social (aut que et PVC sécu soc)

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Patrick Pirrat Expert industriel STX Si les paquebots de luxe sont fabriqués en Europe, c’est principalement parce que les armateurs viennent chercher un look, un design, en particulier en France et en Italie. Les architectes italiens sont très forts dans ce domaine et cela doit nous interpeller. Des nouveautés arrivent, comme le mur végétal, l’utilisation du bambou dans les tissus ou l’utilisation de la lumière. Le mur végétal est un bon exemple parce qu’il a des prolongements sur le traitement de l’air et de l’eau. Nous avons un manque de compétences dans ce domaine sur Saint-Nazaire mais il est vraisemblable qu’elles existent sur Nantes. Il n’est pas possible de construire les plus beaux paquebots du monde sans un réseau de compétences locales. Il y a d’évidence quelque chose à créer. J’aimerais beaucoup qu’il y ait un lieu où l’on viendrait avec une thématique comme celle du bambou, où l’on pourrait se rencontrer, échanger, autour d’une exposition par exemple. Il faut arriver à structurer les choses pour obtenir ce type d’effervescence et je pense que l’on serait surpris, décoiffés même. Les décisions se prennent très rapidement et les enjeux portent sur des millions d’euros.

Éric Boistard Directeur Stereolux En 2005 quand on s’est posé la question de savoir ce que devait être un équipement culturel du XXIème siècle, on s’est dit que ce devait être une sorte de hub, une plate-forme qui fasse dialoguer les différentes disciplines  : la musique, l’image, les arts numériques… On ne peut plus aujourd’hui rester dans une case, un tiroir. D’autant que les artistes du numérique, avec qui on est en lien depuis plusieurs années dans le cadre de Scopitone, avaient déjà des pratiques transversales, et travaillaient volontiers sur des applications ou pour des œuvres de commande. Pour participer à ce décloisonnement, on a imaginé un service dédié au développement du territoire qui ait comme porte d’entrée l’art et la culture et qui conjugue création artistique, économie et enseignement supérieur. Ce qui a donné naissance au « laboratoire des arts et technologies », qui regroupe des gens de différents univers, de différentes filières, aussi diverses que sont la santé, le tourisme ou la construction. Nous sommes sur des champs technologiques et on a besoin d’un contact avec les industriels, les développeurs pour en faire bénéficier les artistes. Cette logique de transversalité fonctionne à plein. On accueille des workshops, des rencontres, comme récemment un séminaire sur les interfaces neuronales. Nous ne sommes pas là pour accompagner les entreprises, nous faisons plutôt fonction de préincubateur d’une action à étages sur le quartier. Stereolux est un peu une histoire de génération. Il y a de nouvelles cultures, de nouvelles façons de communiquer, de nouvelles communautés. Et elles semblent bien se sentir ici. 

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Il n’y a pas que des créatifs dans les filières culturelles et créatives Sur les 36 400 emplois privés que comptent les filières culturelles et créatives à l’échelle des deux aires urbaines de Nantes et Saint-Nazaire, tous ne sont pas créatifs au sens où l’entend l’observatoire. Ces filières comptent par exemple des vendeurs, des comptables, des agents d’entretien, des cadres administratifs… qui ne sont pas recensés comme des métiers créatifs (ce qui ne signifie pas pour autant qu’ils ne mettent pas en œuvre une créativité quotidienne pour exercer leur profession). Ainsi, si l’on isole les métiers dits créatifs, ils représentent autour d’un emploi sur deux dans les filières culturelles et créatives. La structuration entre emplois créatifs et non créatifs est très différente d’une filière à l’autre. Ainsi, dans le numérique, l’architecture, la publicité, le design, la musique, l’audiovisuel, le cinéma et les produits culturels non reproductibles, les emplois créatifs sont plus nombreux que les emplois non créatifs. C’est l’inverse dans la mode, le meuble et le livre.

répartition des emplois sur Nantes / Saint-nazaire Source Insee, traitement Auran Addrn

Emplois créatifs dans les activités créatives

11 % 5 % 4 %

Emplois non créatifs dans les activités créatives

80 %

Emplois créatifs dans les activités non créatives Emplois non créatifs dans les activités non créatives

Un marché du travail plus précaire et plus qualifié Le marché du travail des créatifs a-t-il des spécificités par rapport au reste de l’économie ? Quels sont les besoins du tissu économique et ces besoins correspondent-ils à la typologie des demandeurs d’emploi ? Ont été retenus pour l’analyse, qui s’appuie sur les données de Pôle Emploi, le nombre de demandeurs d'emploi inscrits par métiers entre 2010 et 2012 et les offres d’emploi déposées entre juillet 2012 et juin 2013 en Loire-Atlantique. L’analyse de cet échantillon donne des indications sur le marché du travail, même si Pôle emploi ne recouvre pas l’ensemble des offres émises ni l’ensemble des actifs en recherche d’emploi.

Les offres d’emploi Entre juillet 2012 et juin 2013, plus de 3 000 offres d’emplois ont été déposées par des entreprises des filières culturelles et créatives. 59 % de ces offres concernent la publicité et les études de marché, qui emploient de nombreux téléopérateurs pour réaliser leurs enquêtes, 25 % relèvent de la programmation et du conseil informatiques, et 7 % des produits culturels non reproductibles, en particulier dans le monde du spectacle. Des offres d’emploi davantage à temps partiel  : 60 % des offres proposent une durée de travail inférieure à 32 heures hebdomadaires, notamment dans la mode, le meuble, l’édition, l’imprimerie, la programmation et le conseil informatiques. Les filières culturelles et créatives ont donc beaucoup plus recours au temps partiel que l’ensemble de l’économie, pour lequel cette part descend à 31 %. Plus encore, 53 % des offres d’emploi proposent une durée hebdomadaire inférieure à 20 heures. On retrouve ici les secteurs de la publicité et des études de marché (84 %), des produits culturels non reproductibles et de la musique, de l’audiovisuel et du cinéma. Des offres d’emploi moins du-

rables que dans l’ensemble de l’économie : 51 % des offres d’emploi sont occasionnelles, de moins d’un mois. Seul un contrat sur trois propose un emploi de plus de 6 mois. Cette part d’offres durables est inférieure à celle de l’ensemble des filières économiques (43 %). Les secteurs proposant des offres de longue durée sont plus particulièrement la programmation et le conseil informatiques, l’édition et la mode. À l’inverse, la publicité et les études de marché d’une part, et le secteur de la musique, de l’audiovisuel et du cinéma d’autre part, proposent des contrats très courts, liés au fonctionnement de ces secteurs en mode projet. Si les contrats à durée déterminée (CDD) sont plus courts qu’ailleurs, en revanche, la part des contrats à durée indéterminée (CDI) est comparable à l’ensemble de l’économie, de l’ordre de 30 %. Le numérique propose davantage d’offres en CDI, ce qui traduit le dynamisme de la filière et ses difficultés de recrutement. Le meuble et l’imprimerie se situent pour leur part dans la norme. Àl’inverse, les produits culturels non reproductibles, la mode et la publicité proposent davantage de contrats précaires. Pour ces deux derniers secteurs, le CDD consti-

tue même la très grande majorité des offres d’emploi. Le spectacle vivant peut aussi avoir recours aux CDD en contrat aidé. Enfin, 29 % des contrats proposés par le secteur de l’imprimerie et de la reproduction d’enregistrement sont des contrats saisonniers. Le statut d’intermittent du spectacle est particulièrement répandu dans les secteurs des produits culturels non reproductibles (17 %), de la musique, de l’audiovisuel et du cinéma (27 %). Des offres d’emploi demandant une qualification plus élevée  : 22 % des offres requièrent une qualification de type agent de maîtrise ou cadre contre 12 % dans l’ensemble de l’économie. L’édition, le numérique et dans une moindre mesure la musique, l’audiovisuel et le cinéma exigent bien souvent une qualification de cadre ou d’agent de maîtrise. En revanche, la mode, le meuble et l’imprimerie recherchent plus volontiers des ouvriers, principalement des ouvriers qualifiés.

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La créativité, ressource vitale

Les demandeurs d’emploi En parallèle à ces offres d’emplois, près de 11 000 demandeurs d’emploi ont été enregistrés en décembre 2012. Cela concerne au premier chef les artistes, interprètes, techniciens et animateurs de spectacles, l’édition, la communication, et la publicité, ainsi que le bois. Même si ces données ne recouvrent qu’imparfaitement la réalité du marché du travail, elles témoignent d’une inadéquation partielle entre l’offre et la demande pour les filières des industries culturelles et créatives.

Devenez Créatifs ! Cette injonction faite aux territoires, aux entreprises, aux individus repose sur la constatation que la créativité contribuerait à la performance plus que l’innovation. Cependant, comme le note très justement Suire (2008)11 «  son contour reste extrêmement flou et du point de vue des territoires, l’on mélange souvent l’attraction d’une classe créative – l’agrégation des talents (Florida, 2002)12 – avec les conditions endogènes de la créativité – la combinatoire des talents  ». En effet, la créativité est liée au «  recyclage  », à la recomposition de connaissances existantes qui s’opère dans une confrontation

Les demandeurs d’emploi de moins de 26 ans sont particulièrement représentés dans la conception, la recherche, les études, le bois, l’image et le son, et les industries graphiques. À l’inverse, la part des chômeurs de plus de 50 ans est plus importante dans les métiers du textile, les industries graphiques et la décoration. Les femmes cherchent également du travail dans le textile et la décoration, mais aussi dans l’édition, la communication et la publicité. La proportion des hommes est plus élevée dans le bois, le spectacle, la conception et la recherche, dans le travail du métal, du verre, la bijouterie et l’horlogerie. Les demandeurs d’emploi de longue durée sont très représentés dans le monde du spectacle (notamment en raison du régime d’indèmnisation des intermittents qui restent inscris comme demandeurs d’emploi entre 2 contrats très courts). C’est également le cas pour les métiers du textile, du bois et des industries graphiques, ce qui illustre les difficultés dans les secteurs du livre, de la mode et de l’ameublement.

d’idées entre individus. De ce fait, la créativité, contrairement au talent, émane rarement d’un individu désocialisé. Elle est même stimulée par des effets de rupture qui proviennent d’une diversité cognitive et d’environnements souvent distincts. Pour être créatif, frottez-vous à ceux qui ne vous ressemblent pas et remettez en cause tous vos acquis  ! Facile. Pour stimuler la créativité et s’exercer à ces techniques combinatoires de nombreuses entreprises n’hésitent plus à faire appel à des experts ou des méthodes. La plus connue chez les managers a même un petit nom, elle s’appelle TRIZ  :

acronyme russe de la théorie de résolution des problèmes inventifs Teorija Reshenija Izobretateliskih Zadatch (Теория Решения Изобретательских Задач – ТРИЗ). Faciliter l’agrégation géographique de talents est aussi une option. Les politiques de développement des clusters vont dans ce sens. La proximité géographique est certes facilitatrice mais elle doit être confortée par des réseaux efficaces organisés par des acteurs publics ou privés.

Les formations en action à Québec Suite à la révolution Smartphone qui a de fait touché le monde des jeux vidéo en 2007, le marché de l’emploi a été considérablement impacté. À Québec, la demande en main d’œuvre a été très forte, surtout en basse ville où sont regroupées ces entreprises des «  arts numériques  ». Néanmoins, ces dernières ont eu du mal à recruter parmi les étudiants québécois fraichement diplômés des profils parfaitement opérationnels sur le développement d’applications. Pour satisfaire leurs besoins, elles se sont rassemblées en partenariat avec des établissements de formation pour créer une

«  école d’entrainement  » l’École Nationale en Divertissement Interactif (ENDI). Fondée en 2008, cette école d’un genre nouveau reproduit les conditions réelles d’un studio où les étudiants sont sélectionnés par les services RH puis accompagnés par une des entreprises partenaires. 12 semaines de formation intensive et de pratique en atelier pour être « prêts à l’emploi  », à la sortie un taux de recrutement de 88 %. Malgré son succès, les besoins des entreprises en main d’œuvre ont diminué mettant fin à l’ENDI en 2011. En cause également, la capacité de l’école à s’émanciper des financements pu-

blics et ce malgré les 2 000$ CAN de frais d’inscription. Mais l’ENDI a permis de développer des liens et collaborations entre les entreprises, les studios de création et les établissements scolaires. Cette acculturation mutuelle a été bénéfique pour ouvrir l’entreprise sur l’université et adapter les formations au contexte.

11

 uire R., Vicente J. (2008), Théorie économique des clusters et management des réseaux d’entreprises innovantes, S Revue française de gestion 4/2008 (n° 184), p. 119-136.

12

Florida, R. (2002), The rise of the creative class, Basic Books, New York.

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Zaki Jawhari Urbandrone design J’ai l’impression que l’on vit un changement de paradigme. À un moment donné la science et l’art ont divergé, et aujourd’hui on revient à une approche plus transversale où art et science se rejoignent, comme c’était le cas à la Renaissance. C’est, quoi qu’il en soit, l’approche qui est la mienne, à la croisée de l’architecture, de l’art et de l’ingénierie. Le cœur de ma recherche porte sur la transformation d’un espace avec de la vidéo-projection. Je travaille à partir d’une boite à outils numériques qui me permet d’interfacer différentes technologies et de mettre en forme mes idées. Il peut s’agir de projeter des images de façon très précise sur une architecture, de produire une écriture dédiée au bâtiment. Cela peut aussi consister à sculpter un espace avec de la lumière. Ce peut être encore de concevoir des installations interactives, des dispositifs activés par les passages des gens. Jusqu’à maintenant j’ai beaucoup travaillé à l’étranger, en Thaïlande, au Liban, en Suisse… mais je souhaite désormais me recentrer sur Nantes, une ville qui m’a beaucoup soutenu et où j’ai tous mes partenaires historiques. C’est une ville que j’aime où le relationnel joue beaucoup, pourvu que l’on ait fait ses preuves. Il y a ici un vivier de PME qui veulent faire de la communication et de l’export. J’aimerais leur montrer que l’on peut développer des applications novatrices destinées à mettre en valeur leurs produits.

L’enquête réalisée auprès de 400 chefs d’entreprise des filières culturelles et créatives de Loire-Atlantique montre que les professionnels du secteur ont largement conscience d’être des

les chefs d’entreprise associent volontiers la notion de créativité à celles d’innovation et d’inventivité viviers de créatifs, en particulier les dirigeants de petites structures. Dans l’architecture et le design, entre 91 % et 100 % des entreprises affirment être créatives. Elles sont entre 81 % et

90 % dans la mode et la publicité, et entre 71 % et 80 % dans le numérique, le livre, les produits culturels non reproductibles, le meuble. Globalement, les chefs d’entreprise associent volontiers la notion de créativité à celles d’innovation et d’inventivité (50 %). 26 % estiment qu’elle permet de se démarquer vis-à-vis de la concurrence, de créer une identité propre, une originalité. Enfin, pour 21 % d’entre eux, elle consiste à écouter le marché, afin d’être réactif et adaptable. Sur une échelle de 1 à 6, les chefs d’entreprise évaluent en moyenne à 5 l’importance de la créativité pour la pérennité de leur maison. Très souvent, ils s’identifient

eux-mêmes comme les principaux contributeurs de cette créativité (96 %). Les entreprises qui se définissent spontanément comme créatives, celles qui sont en croissance et celles qui ont des perspectives de développement estiment plus souvent que les autres qu’elles disposent de marges de manœuvre pour progresser en matière de créativité. Si l’on observe par activité, la plupart des dirigeants dans l’architecture, les produits culturels, le design, la mode, le numérique et la publicité considèrent qu’ils peuvent encore faire progresser cette créativité. En revanche, dans le livre et le meuble, ils sont 31 % et 37 % à estimer qu’ils n’ont pas de marges de progression ou qu’ils n’arrivent pas à les identifier.

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L’ÉCOSYSTÈME

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Un enseignement supérieur qui se renforce Les filières culturelles et créatives de Nantes Saint-Nazaire sont soutenues par une densité et une diversité relativement fortes d’acteurs en matière de formation supérieure, dont la réputation nationale est affirmée. Les études réalisées pour le cluster du Quartier de la Création évaluent le poids de l’enseignement supérieur et de la recherche à environ 4 500 étudiants et stagiaires de la formation continue, et à plus de 400 enseignants, enseignants chercheurs et intervenants, sans compter la filière numérique.

Les filières culturelles et créatives de Nantes Saint-Nazaire sont soutenues par une densité et une diversité relativement fortes d’acteurs en matière de formation supérieure

Quatre points forts se dégagent de ces formations  : en matière de design, l’école la plus emblématique est bien sûr l’École de Design Nantes Atlantique. D’autres écoles pro-

posent des formations supérieures comme L’AGR l’École de l’image, pour le webdesign, ou l’Institut supérieur des arts appliqués (LISAA). Les lycées professionnels à l’image de La Joliverie ou Livet sont eux aussi reconnus pour les formations qu’ils proposent dans la discipline. Dans le domaine des arts de la scène, techniques du spectacle et audiovisuel, Le Pont supérieur, pôle d’enseignement supérieur du spectacle vivant, est la locomotive locale. L’école d’architecture propose elle aussi des formations autour de la scénographie. Le lycée Guist’Hau quant à lui est reconnu en France pour sa classe préparatoire Ciné-Sup, et Ciné Créatis forme les étudiants à tous les métiers de l’audiovisuel. Dans la catégorie des services créatifs L’École d’architecture, SciencesCom, l’Université de Nantes et l’Ecole de communication visuelle font partie des principaux établissements formateurs. Enfin, Audencia (école de commerce et de management), l’école des Beaux-Arts, le Conservatoire National des Arts et Métiers et l’Université sont les fleurons en matière de management et d’expertise culturelle. Le cœur de réseau de la sphère créative est essentiellement constitué de l’Université, de l’École d’architecture, de l’École des BeauxArts, de l’École de Design ainsi que

d’acteurs culturels travaillant en partenariat avec plusieurs établissements d’enseignement supérieur et de recherche (Le Grand T, Stéréolux, Le Grand Café, Le Théâtre, Le VIP…). Cette offre de formation reste encore insuffisamment coordonnée, bien que les relations entre écoles se renforcent et que des projets d’insertion de modules créatifs, notamment de design, dans les écoles d’ingénieurs nantaises et nazairiennes (Centrale, Polytech, ICAM, CESI, Ecole Supérieure du Bois, Ecole des Mines…) émergent progressivement. La collaboration entre les établissements d’enseignement supérieur et le monde de l’entreprise est encore peu développée, et se base essentiellement sur des relations bilatérales. Des exemples existent néanmoins, comme en témoignent les relations établies de longue date entre les grands industriels nazairiens et les lycées techniques du territoire autour de prototypes innovants. L’enquête réalisée auprès des 400 chefs d’entreprise confirme la nécessité de rapprocher encore ces deux univers  : 37 % des dirigeants interrogés disent travailler avec des acteurs du monde de la recherche, de la formation et de l’innovation.

L’ÉCOSYSTÈME

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Philippe Bataille Ancien directeur de l’école d’architecture (1997-2013) La « création » aujourd’hui n’est pas le monopole d’une discipline. Le monde contemporain montre et exige à la fois que la dimension créative (au sens non exclusivement artistique ou alors en conférant à ce terme un élargissement englobant la vie quotidienne et ses acteurs) repose sur une dynamique de coopération/co-construction des savoirs. L’implantation de l’ensa (école d’architecture) sur l’Île de Nantes, décidée dès 1997, a naturellement eu un écho immédiat avec l’idée de «  quartier de la création  », tout en refusant l’appellation initiale de « campus des arts », tant pour le terme « campus » que pour celui « des arts » dont la dimension, certes plurielle, restait trop exclusive d’autres domaines de création. La mission de Bernard Stiegler, puis les séminaires animés par celui-ci et « Ars industrialis » ont constitué une des ressources centrales pour permettre le repérage des forces et l’émergence de l’idée partagée de ce que pourrait être ce «  quartier de la création ». L’ensa nantes y a défendu trois idées principales : l’élargissement à la sphère dite technique, celle des écoles d’ingénieurs  ; l’ouverture au monde économique et entrepreneurial (existant et émergent) ; la dimension contributive des sphères non spécialisées. Les implantations prochaines d’autres établissements d’enseignement supérieur et de recherche (école des Beaux-Arts, Sciencescom, Université de Nantes autour du numérique...) constituent la promesse d’autres projets de ce type, capables de contribuer à l’invention d’un modèle sociétal post-consumériste. Le terme « quartier » ne doit cependant pas occulter l’intrication des échelles métropolitaines, régionales et internationales, nécessaire au développement du territoire local.

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Un tissu de petites entreprises Les entreprises unipersonnelles représentent 14 % des 36 400 emplois privés recensés dans les filières culturelles et créatives, elles sont plus fortement représentées dans le design (78 % des emplois), la photographie (60 %), l'information (40 %) et l'architecture (32 %).

Pierre-Jean Galdin Directeur de l’école des beaux-arts

Poids des entreprises unipersonnelles dans l'emploi estimé par filière culturelle et créative Sources Insee, Acoss, traitement Auran Addrn

Lorsque je suis arrivé à Nantes en 2004, un projet de restructuration de l’école était en route. Elle devait se diviser en deux sites, dont l’un dans le quartier Madeleine. À l’inverse, j’étais favorable au regroupement de plusieurs écoles en un même lieu, plutôt que de multiplier les options. Une enquête menée sur les grands sites créatifs en Europe (Londres, Helsinki…) m’a conforté dans mon approche. Il fallait plutôt créer un « campus des arts » pour jeter des passerelles entre les disciplines créatives, enrichir le tissage. En France on a trop souvent une vision cloisonnée de l’enseignement. Or l’architecture, les beaux-arts, la communication, les sciences humaines doivent pouvoir dialoguer. L’histoire de l’art est faite de croisements. Nous en avons parlé avec les responsables d’autre écoles (architecture, design, communication…) et commencé à trouver des modalités de coopération. L’Île de Nantes était le lieu idéal, même si à l’époque peu de gens imaginaient qu’elle allait devenir un véritable centre. On me disait «  tu passes la Loire et tu n’existes plus. » Les choses ont bien changé, et nous avons commencé à monter des formations communes, des programmes de recherche. Cela étant, nous avons un problème de temporalité. Il nous faut atteindre un seuil de quatre ou cinq mille étudiants pour que les effets de la coopération entre les écoles supérieures et l’université portent leurs fruits. Il faut des incubateurs, des formations croisées, des programmes de recherche. Des lieux aussi, comme la cantine, imaginée par Jean Blaise. Je suis optimiste sur le long terme, même s’il faut rester attentifs au risque de gentrification l’île.

Part des établissements des filières culturelles et créatives en fonction de leur taille Source Insee, traitement Auran Addrn

3 %

2 % 1 %

5 % 12 %

16 %

61 %

Voir légende p.40 Établissements unipersonnels Emplois salariés

0

2000

4000

6000

8000 10 000 12 000 14 000 16 000

Neuf établissements sur dix comptent moins de dix salariés. Ces chiffres sont conformes à l’ensemble du tissu économique local, mais les différences sont, en revanche, très fortes d’une filière à l’autre. Ainsi, dans le design, le numérique, l’architecture, la photo et les produits culturels non reproductibles, 70 % et plus des établissements n’ont pas de salarié (jusqu’à 94 % dans le design, 82 % dans la photo). A l’inverse, la proportion «  tombe  » à 45 % dans la mode, 52 % dans le meuble, 54 % dans le livre. L’enquête réalisée auprès des chefs d’entreprise confirme cette réalité, due en partie à la jeunesse du tissu économique (notamment dans le numérique et le design), la moitié des entreprises ayant été créée depuis 2006. Les entreprises liées à la diffusion et à la distribution ont tendance à être plus anciennes que celles liées à la conception et à la fabrication. On peut noter que 98 % des établissements sont dans le champ marchand, 2 % dans le champ associatif13. 13

0 salarié

20 à 49 salariés

1 à 5 salariés

50 à 99 salariés

6 à 10 salariés

100 salariés et plus

10 à 19 salariés

La majorité des industries culturelles et créatives affiche un rayonnement commercial limité aux marchés local et régional, mais plus d’une sur dix témoigne d’un rayonnement international. Les entreprises du meuble et de la mode, en raison d’un modèle économique tourné localement vers la diffusion, ont, pour la plupart, un rayonnement local ou régional, tout comme l’architecture et les produits culturels non reproductibles. En revanche, la logique numérique est nationale et internationale.

 e secteur associatif est sous-estimé, car l’Insee exclut les associations sans salarié, afin de limiter la prise en compte L d’établissements sans réalité économique.

L’ÉCOSYSTÈME

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L’ÉCOSYSTÈME

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Un chef d’entreprise sur quatre souhaite élarg i r son rayonnement commercial, notamment dans les produits culturels non reproductibles, le livre, le numérique, ainsi que l’architecture et le design, contrairement à la mode, au meuble, à la photographie et à la publicité. Les ambitions des uns et des autres sont différentes en fonction des secteurs. L’architecture vise le national, la culture l’Europe, le numérique l’international. Logiquement, les grosses entreprises ont plus tendance que les autres à envisager un développement international.

Rayonnement commercial des entreprises interrogées Source : enquête menée en décembre 2013 auprès de 400 chefs d’entreprise des filières culturelles et créatives

5 %

8 % 30 %

Régional National

28 %

Européen Mondial 29 %

Local

Laurent Théry Directeur général de la Samoa (2004-2010) Il n’y a pas eu un plan d’installation d’activités créatives sur l’Île de Nantes. Les choses se sont faites naturellement, au fil d’une série d’opportunités et de jeux d’acteurs. L’essentiel pour nous était d’être accueillants aux initiatives. La première implantation discutée avant la création de la Samoa a été celle du quotidien Ouest-France, qui souhaitait s’installer sur l’île. Puis il y a eu Radio France. L’ouverture des premières télés locales, qui cherchaient un site pas trop cher, a été l’occasion de renforcer le mouvement. Nous avions racheté les halles Alstom et nous leur avons proposé. Comme nous étions propriétaires de l’ensemble, nous nous sommes installés sur place et nous avons réalisé quelques transformations a minima avant d’ouvrir les locaux à d’autres créateurs, de toute nature  : artistes, éditeurs, musiciens… Les locaux se sont emplis assez vite. Mais il ne s’agissait pas d’une pépinière, il n’y avait pas de services communs. Les occupants s’arrangeaient eux-mêmes pour partager des services, et faire face aux inconvénients de l’installation dans une friche industrielle : pannes d’électricité, d’informatique, fuites d’eau… C’est rapidement devenu un lieu de partage et de rencontre. Et nous avons organisé une première exposition dans la halle 6. La mécanique était lancée et les choses se sont enchaînées. L’essentiel pour nous a toujours été de rester ouverts aux initiatives.

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L’ÉCOSYSTÈME

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Les collectifs au cœur de l’écosystème créatif Yann Jaffiol Blockhaus DY10 Le blockhaus DY10 a été l’un des premiers bâtiments squatté sur l’Île de Nantes. C’est un ancien abri anti-aérien pour les ouvriers qui travaillaient sur les Chantiers pendant la guerre. Des étudiants en archi et des beauxarts s’y étaient installés au début des années quatre-vingt-dix pour préparer leur diplôme. Ils l’ont nettoyé, décloisonné et peu à peu investi. Depuis, les premiers occupants ont fait leur chemin. Métalobil est devenue une entreprise reconnue sur la place en architecture intérieure et en création d’objets, mais elle a conservé un bureau ici. Aujourd’hui le blockhaus est presque devenu un squat de luxe – on a tout refait, électricité, plomberie, étanchéité - , mais il a conservé sa vocation de départ  : accueillir des structures fragiles, des passionnés d’architecture, de graphisme, de bande dessinée ou de musique qui évoluent en marge du système, entre bénévolat et activité professionnelle. Le loyer est modéré, il faut essentiellement payer l’eau et l’électricité. Au total on doit être une trentaine et on occupe huit alcôves par niveau. C’est un lieu associatif, non subventionné et totalement indépendant, même si la Ville nous a aidés pour faire quelques travaux. On est plutôt contents d’être installés ici, en centre-ville, dans un superenvironnement. Quand il y a des expos, on bénéficie de l’effet éléphant.

À travers une série d’articles, Laurent Simon et Patrick Cohendet14 d’HEC Montréal s’attachent à expliquer les mécanismes de production et d’exploitation de la créativité. Ils analysent notamment le rôle des «  collectifs créatifs  » qui selon eux constitueraient des acteurs incontournables de l’écosystème créatif des villes. Selon ces auteurs, cet écosystème s’articulerait autour de trois niveaux qu’ils nomment respectivement upperground, underground et middleground. «  Les firmes upperground - absorbent des connaissances émergeant des activités créatives de la ville alors que les acteurs de l’underground explorent et proposent de nouvelles avenues créatives.  » Selon les auteurs, la présence des collectifs qui compose le middleground est essentielle à la transmission de la connaissance de l’underground vers l’upperground. Ils jouent également un rôle social de mise en réseau et d’interface. En basant leur analyse

sur des travaux en créativité organisationnelle, les auteurs insistent sur le rôle de ce groupe intermédiaire qui «  permettrait à la créativité des individus et groupes underground de « percoler » jusqu’aux firmes ». Le middleground, trait d’union entre deux mondes peut être le fait de différents groupes. Il serait composé de «  passeurs de connaissance » et acteurs incontournables de la mise en réseau. Les collectifs créatifs sont présentés comme un exemple de middleground et constitués par «  un nombre restreint d’individus réunis par le projet de créer ensemble ». Les membres des collectifs se regroupent volontairement autour d’un projet souvent «  en négatif  », c’est à dire en opposition avec une forme dominante ou instituée «  parce qu’elle imposerait un discours unique, ou parce qu’elle aurait perdu sa propre essence créative  ». Ils questionnent les pratiques établies, l’identité de l’industrie pour proposer de nouvelles valeurs

et de nouvelles façons de faire. Réunis pour essayer autre chose, explorer de nouvelles pistes, les collectifs créatifs favorisent la prise de risque. Les créations individuelles pouvant porter la marque ou l’identité du collectif, la prise de risque se fait à plusieurs et le soutien des membres repose sur «  la confiance dans les intentions ». Contrairement aux clusters qui sont des formes plus institutionnalisées de middleground, les collectifs créatifs, plus flexibles et rassemblés autour de valeurs, apparaissent comme un élément phare de l’écosystème créatif des villes. Ces collectifs pourraient devenir des partenaires indispensables de la créativité organisationnelle mais «  cela ne se fera qu’au prix de la mise en œuvre d’une relation attentive à leur fonctionnement, sensible à leur indépendance, et respectueuse de leur identité ».

Laurent Simon (2009) Underground, upperground et middle-ground : les collectifs créatifs et la capacité créative de la ville, Management international Volume 13, numéro hors série, p. 37-51.

14 

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Conception, fabrication, diffusion

L’ÉCOSYSTÈME

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Patrice Coupechoux président Groupe Coupechoux J’ai la faiblesse d’avoir été formé à l’école des beaux-arts et d’être sensible à toutes les formes de création. En cherchant un site pour rapprocher notre siège du centre-ville, mon choix s’est naturellement porté sur l’Île de Nantes, un emplacement stratégique, proche de toutes les commodités. Même si au moment de la construction nous faisions un peu figure de pionniers. Nous sommes la première entreprise privée à avoir investi sur l’île, au début du projet urbain. J’ai souhaité construire un bâtiment emblématique, poser un geste architectural, ériger un totem dans la tradition des capitaines d’industrie nantais. L’immeuble Manny, conçu par le cabinet Tétrarc n’en est pas moins un bâtiment hyperfonctionnel. Sur l’île, il y a une vision d’un quartier, une vision de la ville, c’est capital. Les organes sont là, mais il faut un cœur. Et ce n’est pas encore tout à fait le cas. Il faudra encore quelques années. Le projet Alstom, l’arrivée de l’école des Beaux-arts, vont faire respirer le reste. Il est important, dans cette perspective, de laisser un peu de cahot. Ce n’est pas gênant si l’on sent une âme, des valeurs. Déjà le lieu fait rêver, comme en témoigne l’étonnement et l’enthousiasme des designers étrangers lorsque l’on organise des conférences internationales.

Les deux tiers des entreprises créatives du territoire sont des établissements de conception ou de fabrication (25 700 emplois), le dernier tiers est tourné vers la diffusion (10 700 emplois). La structure est très différente selon les filières.

Part des établissements faisant partie du champ de la conception / production et de la diffusion par filière culturelle et créative Source Insee, traitement Auran Addrn

À l’échelle de Nantes Saint-Nazaire, la mode est essentiellement centrée sur la diffusion (près de 90 % des établissements). Le meuble, lui, s’il est aussi majoritairement tourné vers la diffusion (60 %), conserve des fonctions de fabrication mais très peu de conception. Dans le livre, 40 % des établissements sont liés à la diffusion. En revanche, architecture, numérique, design, publicité, produits culturels non reproductibles sont très tournés vers la conception.

25 700 emplois relèvent d’activités de création et de production, tandis que 10 700 relèvent de la diffusion (intermédiaires et commerces de détail).

Conception production Diffusion

Voir légende p.40

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

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Des collaborations nombreuses mais à conforter

Christian Guellerin Directeur de l’école de design Les entreprises du XXème se sont posé la question de ce qui était techniquement possible et économiquement profitable. Les entreprises du XXIème doivent se poser la question de ce qui fait sens. Nous devons réfléchir sur les usages, sur la façon dont nous vivrons dans cinq, dix ans, et avoir une réflexion stratégique sur les produits à venir, sur la ville durable, les nouvelles pratiques alimentaires, les conséquences du vieillissement, mais aussi l’interactivité, la réalité virtuelle… Je ne crois pas à l’artiste démiurge qui travaille tout seul dans son coin, je crois au designer qui partage, mutualise et relie les hommes et les compétences. La vertu n’est pas d’avoir des idées mais de pouvoir les appliquer, les mettre en oeuvre. Et aujourd’hui il faut partager les expériences, les savoirs, les techniques pour aboutir à de véritables innovations. Si on se trouve dans un endroit où se fait ce partage ça m’intéresse. C’est la raison pour laquelle je crois aux synergies entre établissements supérieurs – école d’architecture, école des Beaux-Arts, Sciences Com, école de Design, Université - qui se profilent sur l’Île de Nantes. Nous avons d’ailleurs déjà commencé à mettre en place des doubles diplômes avec certains établissements. Mais nous devons aller plus loin, créer un écosystème qui relie formation, recherche et entreprises. L’innovation ne vaut qu’à la condition de l’entrepreneuriat qui, seul, au bout du compte, crée de la valeur sociale.

L’ÉCOSYSTÈME

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Globalement, l’enquête auprès des dirigeants montre que la collaboration inter-entreprises est répandue puisque 48 % la pratiquent. La proportion est nettement plus élevée dans l’architecture (67 %), le numérique (57 %), le design (56 %), activités dans lesquelles les entreprises appartiennent fréquemment à un pôle de compétitivité, un cluster, un club d’entreprises. Les établissements les moins enclins à collaborer appartiennent aux filières de la mode, du livre, des produits culturels non reproductibles et du meuble. La taille de l’entreprise joue fortement sur sa propension à collaborer avec ses concurrentes. Plus elle est petite, moins elle mettra en place des collaborations : elle aura moins tendance à appartenir à un club d’entreprises, moins de chances que les autres de rencontrer d’autres acteurs de son secteur, moins d’op-

La taille de l’entreprise joue fortement sur sa propension à collaborer avec ses concurrentes portunités de travailler avec le monde de la recherche et de répondre à des appels d’offre en commun. Une grande majorité des dirigeants estime pourtant que la collaboration a un intérêt. Les freins sont essentiellement le manque de temps (47 %), la peur d’être imité (33 %), l’absence de sollicitation (27 %).

Les chefs d’entreprise interrogés estiment que la concurrence sur leur secteur est forte, à l’échelle locale comme nationale. Cette concurrence est perçue comme plus faible à l’international. Les réponses diffèrent en fonction de l’échelle  : l’architecture et la publicité ressentent plus fortement la concurrence localement, les produits culturels non reproductibles, le livre et le meuble nationalement. Pour la mode, le numérique et le design, la concurrence est ressentie aux trois niveaux.

Freins à la collaboration selon les dirigeants des entreprises interrogées

Source : enquête menée en décembre 2013 auprès de 400 chefs d’entreprise des filières culturelles et créatives

Vous n’avez pas le temps

53% 47%

Vous avez peur d’être limité

67% 33%

72%

Vous n’avez jamais été sollicité

Vous ne voyez pas l’intérêt Peu d’accord Pas du tout d’accord

27%

83% 16% Assez d’accord Tout à fait d’accord

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Les clusters culturels et créatifs Dominique Sagot-Duvauroux Enseignant-chercheur Les Industries Culturelles et Créatives sont, pour la plupart, de très petites entreprises, indépendantes, qui ont une économie de projets. Pour elles, la proximité spatiale est essentielle. Elle permet d’associer les compétences, autorise la circulation des individus, des idées. La cartographie des collaborations entre la cinquantaine d’entreprises installées dans les halles Alstom dont certaines se sont ensuite retrouvées au Karting a permis de comprendre à quelles conditions cette proximité génère de la coopération et de l’innovation. Première constatation, ce n’est pas vraiment une surprise, l’hyper-proximité, le fait que l’on se croise régulièrement dans un même lieu, que l’on se retrouve pour fumer une cigarette, provoque naturellement de la coopération. Deuxième constat : la proximité cognitive. On a plus facilement tendance à coopérer si l’on partage un même socle de connaissances, si l’on met en œuvre des techniques voisines. Troisième donnée  : le partage de valeurs. Plus on est proche en matière de culture, plus on travaille volontiers ensemble. Dans la chaîne graphique, on distingue de ce point de vue deux groupes  : ceux qui travaillent avec des logiciels propriétaires, et ceux qui travaillent en open source. Cette proximité est d’une des clefs de la réussite des clusters créatifs à travers le monde, où la question de la spécialisation territoriale se pose un peu partout dans les mêmes termes. Hollywood reste l’exemple le plus parlant dans ce domaine.

La majorité des études qui s’intéressent à la dynamique économique des clusters culturels et créatifs paraissent au début des années 2000. Néanmoins, la réflexion sur le regroupement territorial d’acteurs appartenant à une même chaîne de valeur a donné lieu à plusieurs conceptualisations en économie régionale, principalement depuis les années 197015. Si le terme de cluster semble aujourd’hui faire foi dans la communauté scientifique, un chapelet de concepts s’est égrainé depuis une quarantaine d’années  : District, Système Productif Local, Milieu Innovateur… Tous ces concepts font référence à la mise en synergie des entreprises locales où l’organisation en «  réseau  » est généralement considérée comme bénéfique grâce à une circulation des connaissances facilitée.

Le terme de cluster a émergé dans les années 1990 aux Etats-Unis dans une économie numérique en plein essor. Les premières analyses sont tout d’abord effectuées à partir de success stories comme celle, emblématique, de la Silicon Valley et sur des activités de haute technologie. Michael Porter (1998)16, qui en donne la définition, met l’accent sur les relations formelles et contractuelles entre les différents acteurs appartenant au cluster ainsi que sur le rôle des réseaux informels dans la réussite collective. Le cluster est alors défini comme «  une concentration géographique d’entreprises interconnectées, de fournisseurs spécialisés, de prestataires de services, d’entreprises connexes, et d’institutions associées (par exemple, les Universités, les agences de normalisation et les structures

de commercialisation) sur des domaines particuliers sur lesquels ils sont en concurrence mais également coopèrent  ». Le modèle de Porter est fondé sur la recherche d’avantages concurrentiels qui s’obtiennent grâce aux interactions entre quatre facteurs complémentaires  : les ressources, l’environnement politique, législatif et économique, un marché local de qualité, un tissu local riche de fournisseurs et d’industries connexes. Ce modèle est à considérer comme un système en évolution et plus efficace lorsque les acteurs sont regroupés géographiquement. Les interactions entre ces quatre déterminants permettent de créer et de maintenir un avantage concurrentiel. Le concept de cluster a été adopté par les acteurs publics qui l’ont décliné sous différentes formes quel que soit

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

L’ÉCOSYSTÈME

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le domaine d’activité. Dans les années 2000, le cluster devient un « outil » à la mode et on assiste à une assimilation de la définition à tous les concepts précédents (district, SPL, milieu innovateur ou learning region). Cette période est aussi marquée par le début de grands projets de régénération urbaine autour des activités culturelles en réponse aux crises des années 1980. Avec le discours et les recherches autour de l’économie et de la ville créative, un

véritable engouement autour de ces problématiques voit le jour. En résulte une multiplication de projets mixtes à cheval entre développement culturel, territorial et économique. Ils misent sur le développement de clusters culturels et s’accompagnent de politiques de soutien aux entreprises créatives (soutien financier, hébergement, accompagnement, développement de réseau). Ces projets de régénération sont vus comme un moyen de s’insérer

dans un marché mondialisé où le développement des territoires est de plus en plus dépendant de leur capacité à concevoir, à produire et à faire circuler des produits culturels (Zukin, 1995)17. Les ressources du territoire et sa capacité à faire travailler ensemble des acteurs aux intérêts divergents deviennent des facteurs clés de localisation.

15

 Chesnel, S.; Molho, J. ; Morteau, H. Raimbeau, F. ; Dir Sagot-Duvauroux D. (2012), Les clusters ou districts industriels du C domaine culturel et médiatique : Revue du savoir économique et questionnement, Département des Etudes de la Prospective et des Statistiques (DEPS) du Ministère de la Culture et de la Communication par le laboratoire GRANEM (Groupe de Recherche ANgevin en Economie et Management), Université d’Angers. 62p.

16

Porter, M. (1998), Clusters and the new economics of competition. Harvard Business Review 11 : 77-90.

17

Zukin, S. (1995) The Cultures of Cities, Oxford, Blackwell.

Les SPéCIFICITÉS DE NANTES SAINT-NAZAIRE : NUMÉRIQUE, ARCHITECTURE, PUBLICITÉ

Les SPéCIFICITÉS DE NANTES SAINT-NAZAIRE : NUMéRIQUE, ARCHITECTURE, PUBLICITé

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Les spécificités de Nantes Saint-Nazaire :

numérique, architecture, publicité

La métropole Nantes Saint-Nazaire concentre 42 % des emplois des filières culturelles et créatives de la région Pays de la Loire, une proportion supérieure à son poids dans l’économie régionale (36 % des emplois).

Répartition des emplois des filières culturelles et créatives sur les aires urbaines fonctionnelles de Nantes et Saint-Nazaire 36 400 emplois Source : INSEE, ACOSS, traitement Auran ADDRN

Aire urbaine fonctionnelle de Saint-Nazaire 3 600 emplois / 9 %

61 % des emplois de l’aire urbaine de Saint-Nazaire

Aire urbaine fonctionnelle de Nantes 32 800 emplois / 91 %

87 % des emplois de l’aire urbaine de Nantes

 Saint-Nazaire  Saint-Nazaire Agglomération  Aire urbaine fonctionnelle

 Nantes  Nantes Métropole  Aire urbaine fonctionnelle

Au regard des grandes agglomérations françaises, la métropole nantaise est particulièrement bien positionnée sur le numérique, ainsi que sur l’architecture et la publicité. Ces trois secteurs continuent à créer des emplois sur le territoire. Ces spécificités ont tendance à se renforcer dans le temps. Le meuble est, dans une moindre mesure, une spécificité du territoire, et continue à créer des emplois malgré une conjoncture régionale difficile. Dans un univers très concurrentiel entre territoires, Nantes ne gagne pas vraiment de terrain sur le design, en dépit de son dynamisme. Même constat pour ce qui concerne la musique, l’audiovisuel, le cinéma, bien que les créations d’emploi restent soutenues. Du côté des produits culturels non reproductibles, la métropole nantaise ne se distingue pas particulièrement, mais est très créatrice d’emplois. Enfin, pour la mode, le livre et la photographie, elle subit la crise comme ailleurs et perd des emplois.

urbaines fonctionnelles de même taille, car ses particularités relèvent davantage de la grande industrie. Il renforce néanmoins son positionnement dans la photographie, la publicité, le meuble (notamment en lien avec les agenceurs de luxe dont l’activité est reliée au design), la musique, l’audiovisuel et le cinéma. En revanche, sa position se dégrade sur les produits culturels non reproductibles, le livre et l’architecture. Du point de vue des chefs d’entreprise interrogés le territoire Nantes / Saint-Nazaire est plutôt bien positionné dans l’architecture, la mode, le design et le numérique. En revanche, dans les produits culturels, le livre et le meuble, ils estiment que la métropole ligérienne ne se distingue pas particulièrement. Ils considèrent par ailleurs Paris comme une référence nationale et internationale. Lyon est également citée par deux entreprises du design sur cinq. Les Etats-Unis sont la référence dans le numérique, l’Italie ressort pour le meuble. Les réponses des chefs d’entreprise montrent l’importance de la dimension métropolitaine des filières culturelles et créatives : plus de la moitié cite des grandes villes du monde (Londres, New York, Paris, San Francisco…) plutôt que des régions ou des pays.

Croisement entre l’indice de spécificité18 des territoires et l’évolution de l’emploi sur ces mêmes territoires, entre 1993 et 2010 Source : Pôle Emploi, Acoss, traitement Auran, Addrn

SPÉCIFICITÉ + Numérique

Meuble Publicité

Meuble Photo

Publicité

Mode

La plupart des filières culturelles et créatives présentes sur Saint-Nazaire sont créatrices d’emplois sur la longue durée : meuble, publicité, mode, architecture, numérique, produits culturels non reproductibles. Le territoire dispose de peu de spécificités en comparaison des aires

Meuble Pt cult. design non repro.

Livre

ÉVOLUTION DE L’EMPLOI -

Musique, Mode TV... Architecture

Photo Photo

Livre

Architecture Architecture

Publicité

Pt cult. non repro.

Livre

Design

Design

Pt cult. non repro.

Numérique

ÉVOLUTION DE L’EMPLOI +

Mode Musique, TV... Information Pays de la Loire

Musique, TV...

Numérique Information

SPÉCIFICITÉ -

18

Aire urbaine fonctionnelle Nantes Aire urbaine fonctionnelle Saint-Nazaire

 ’indice de spécificité rapporte le poids d’une activité dans un territoire au poids de cette L même activité sur un territoire de comparaison. Ainsi, plus l’indice est fort plus l’activité est présente sur le territoire. Plus il est faible, moins elle est présente

Les SPéCIFICITÉS DE NANTES SAINT-NAZAIRE : NUMéRIQUE, ARCHITECTURE, PUBLICITé

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Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Pierre Oréfice Directeur des Machines de l’île On est tombés dans un cercle vertueux magique. Nous arrivions avec un projet tout fait, la gare de l’éléphant était dessinée, quand Alexandre Chemetoff, qui est pour moi un urbaniste visionnaire, est venu nous voir pour nous dire «  et si vous vous installiez là-dessous  », en nous montrant les hangars où était installée La Trocante. Je connaissais les lieux puisque nous avions monté « L’histoire de France » avec le Royal de Luxe dix ans plus tôt dans un bâtiment voisin, depuis lors remonté à Chantenay. Mais il fallait une sacrée imagination pour arriver à penser qu’on pouvait faire quelque chose de ces hangars. Il voulait peupler l’espace en fonction de l’avancée des travaux. Et en cela on se rejoignait : il n’est pas possible de faire un morceau de ville sans lui donner une âme. Il y a eu une vraie intelligence de la situation. Des repas au restau où on phosphorait ensemble. Il fallait bouger la technostructure, trouver des solutions à des problèmes apparemment insolubles. Et on y est parvenus. L’arrivée de Stereolux a été un pas supplémentaire. Il y a une vraie collaboration entre nous sur la programmation, une vraie complémentarité entre le gratuit et le payant. Et tout ça produit une sacrée dynamique, les publics se mélangent, les Nantais s’approprient les lieux. Et puis toute l’équipe des Machines de l’île vient du spectacle vivant. Il faut que ça bouge.

Julien Le Thuillier Le Fab À Saint-Nazaire il y a une culture du faire, une culture du garage. Tout le monde ou presque a un atelier chez soi. Les gens aiment mettre les mains dans le cambouis. C’est comme ça que j’ai commencé, en fabriquant moi-même ma première imprimante 3D à partir de pièces récupérées dans l’entrepôt d’une association qui reconditionne d’anciens PC. Il y avait des plans en open source sur internet, mis en ligne par un prof du MIT, qui a permis l’émergence des fab lab à travers le monde. Ce qui est génial avec les fab lab, c’est qu’aucun projet n’est trop fou. On se trompe, on recommence, et on parvient, en partageant sans cesse les savoirs et les expériences à fabriquer des machines qui sont plus compétitives et moins chères que dans l’industrie. J’ai travaillé avec un ancien prof en électrotechnique du Mans et avec un autre passionné, JeanPhilippe Jubenot, qui a depuis intégré le Fab, la structure que nous avons créée avec mon épouse, Aurélie. Aujourd’hui nous avons deux activités distinctes, l’une associative, basée sur le partage avec une communauté de passionnés et une entreprise à part entière qui réalise du prototypage rapide, des pièces uniques ou de très petites séries pour l’industrie. Cela permet aux soustraitants des grands donneurs d’ordre, dans la navale ou l’aéronautique, de répondre rapidement aux appels d’offre. Il est important pour les entreprises de se tourner vers ce type de technologie pour évoluer rapidement.

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La région Pays de la Loire Les Pays de la Loire sont la quatrième région française derrière l’Île de France, Rhône-Alpes et Provence-Alpes Côte d’Azur, et représentent 5 % des effectifs nationaux en termes d’emplois dans les filières culturelles et créatives. Ils comptent 20 900 établissements pour 86 900 emplois, dont 30 % dans la mode et ses accessoires et 20 % dans le numérique. 71 % (61 800) relèvent d’activités de création et de production, 29 % de la diffusion (intermédiaires et commerces de détail). C’est dans la mode et le meuble que ces derniers emplois sont les plus nombreux. Globalement, les industries culturelles et créatives représentent 8 % de l’économie ligérienne.

Sur la période 1993-2010, les emplois salariés privés dans les filières culturelles et créatives sont en recul de 12 %, en raison notamment du déclin de la mode (-44 %) et du meuble (-22 %), un phénomène que l’on constate partout en France. La photo est en très net recul (-70 %) mais ne concerne pas beaucoup d’emplois. A l’inverse, le numérique a connu une évolution spectaculaire en multipliant presque par quatre ses effectifs (+364 %), l’architecture a progressé de 84 %, la publicité de 64 %.

Évolution du nombre d’emplois salariés privés dans les filières culturelles et créatives entre 1993 et 2010 en Pays de la Loire Source Unistatis, traitement Auran Addrn

Part des emplois par filière culturelle et créative en Pays de la Loire

Poids de la création/production et de la diffusion en termes d’emplois par filière culturelle et créative en Pays de la Loire Sources Insee, Acoss, traitement Auran Addrn

Architecture

50 000

Produits culturels non reproductibles Design

45 000

Information

Sources Insee Acoss, traitement Auran Addrn

Livre

40 000

Meuble

Conception/fabrication 1% 8%

1%

4 %

Musique, audiovisuel, radio, cinéma

Diffusion

1%

8%

Mode

35 000

Voir légende p.40

Numérique

30 000

Photo

10%

20%

Publicité

25 000

Voir légende p.40

12%

3%

20 000

33%

15 000

Architecture Produits culturels non reproductibles Design

Mode Musique, audiovisuel, radio Numérique

Information Livre Meuble

Photographie Publicité

10 000

0

5000

10 000

15 000

20 000 25 000

30 000

5 000

0

3 4 5 6 7 8 9 0 01 2 3 4 5 6 7 8 9 10 199 199 199 199 199 199 199 200 20 200 200 200 200 200 200 200 200 20

Sur la période 2007-2012, les Pays de la Loire passent de 74 800 emplois salariés privés à 74 600, soit une quasi-stabilité, comparable à l’évolution de l’emploi salarié privé dans son ensemble. Les évolutions sont néanmoins très contrastées en fonction des filières : le livre (-20 %), le meuble (-15 %) et la mode (-5 %) sont en recul, alors que le numérique (+37 %) et le design (+30 %) sont en très nette progression.

Les SPéCIFICITÉS DE NANTES SAINT-NAZAIRE : NUMéRIQUE, ARCHITECTURE, PUBLICITé

84

87

Tableau SYNOPTIQUE

86

Tableau SYNOPTIQUE

89

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Tableau SYNOPTIQUE

Architecture

Design

Livre

Meuble

Mode

Musique, audiovisuel, cinéma

Numérique

Produits culturels non reproductibles

Publicité

Ensemble des secteurs économiques de Nantes Saint-Nazaire

Nombre d’emplois

1 800

500

2 600

2 600

7 600

900

13 400

3 000

3 700

408 500

Sur l’aire urbaine fonctionnelle de Nantes

1600

450

2 300

2 200

6 000

800

13 200

2 700

3 300

337 100

Sur l’aire urbaine fonctionnelle de Saint-Nazaire

200

50

300

400

1600

100

200

300

400

71 400

Part dans l’ensemble des emplois de Nantes Saint-Nazaire

0,4 %

0,1 %

0,6 %

0,6 %

1,9 %

0,2 %

3,3 %

0,7 %

0,9 %

100 %

Part que représente Nantes Saint-Nazaire dans les Pays de la Loire

51 %

53 %

28 %

25 %

27 %

37 %

76 %

42 %

57 %

36 %

Evolution des emplois salariés privés entre 1993 et 2010

+102 %

+298 %

-25 %

+28 %

-5 %

+43 %

+443 %

+107 %

+72 %

+51 %

Evolution des emplois salariés privés entre 2007 et 2012

+1 %

+85 %

-20 %

-12 %

+11 %

-2 %

+37 %

+7 %

+18 %

+4 %

Nombre d’établissements créés en moyenne entre 2009 et 2012

110

300

90

60

430

40

450

210

110

10 500

Nombre d’établissements créés en 2012 pour 100 établissements existants

10

80

10

10

20

20

30

30

20

15

Tableau SYNOPTIQUE

88

91

Localisation des FILIÈRES CULTURELLES ET CRÉATIVES SUR NANTES MÉTROPOLE ET SAINT-NAZAIRE AGGLOMÉRATION

Localisation des FILIÈRES CULTURELLES ET CRÉATIVES

90

Localisation des filières culturelles et créatives sur Nantes Métropole et Saint-Nazaire Agglomération

Anne Mie Depuydt Architecte Urbaniste

Comment sont localisées les activités culturelles et créatives sur les territoires de Nantes et de Saint-Nazaire ? Y a-t-il des logiques de polarisation ? Les logiques sont-elles les mêmes pour la création/fabrication et pour la diffusion ? Sur Nantes Métropole, l’hypercentre joue un rôle très polarisant. Pour les activités qui concentrent beaucoup d’emplois (numérique par exemple), on retrouve ensuite la logique des grands boulevards, puis du péri-

phérique. Dans le meuble, la mode et le livre, les logiques diffèrent entre création/fabrication et diffusion, car apparaissent alors les grands pôles commerciaux de l’agglomération (la route de Vannes étant d’ailleurs appelée par les Nantais la route du… meuble). Sur Saint-Nazaire, la concentration des établissements créatifs nécessite un zoom sur Saint-Nazaire, Trignac, Pornichet, La Baule et Saint-André des Eaux. L’hypercentre de Saint-Nazaire

et des stations balnéaires de la Baule et de Pornichet joue ainsi un rôle très polarisant. Pour la mode et le meuble émerge la zone commerciale de Savine à Trignac. Sur le numérique et les services créatifs, c’est davantage la polarité tertiaire d’Océanis.

À NANTES métropole Source : fichier Sirene (INSEE) géolocalisé par l’Auran

conception/production Les jeunes créateurs qui se sont installés dans les halles Alstom il y a dix ans ont posé une base solide. Ils ont donné une âme au quartier, même si ceux qui étaient là au départ sont maintenant des professionnels confirmés, qui ont besoin de meilleures conditions pour travailler. Ce n’est pas simple parce que le butinage exige de la proximité géographique, des distances courtes et que l’on disposera de moins en moins de bâtiments industriels. Et puis nous sommes sur des temporalités provisoires, des installations sommaires, des loyers pas chers et il faut tenir compte du fait que la création se déplace. Il y a des cycles. Aujourd’hui c’est la musique, l’informatique, les beauxarts, l’architecture. Demain ce sera peut-être autre chose. C’est pour cela que nous conservons une grande élasticité programmatique. Il faut savoir laisser des trous. Aujourd’hui il y a le Karting, nous allons le conserver le plus longtemps possible, et puis tous les rez-de-chaussée des quartiers anciens, notamment le Faubourg, qui est très riche en ateliers. Nous allons rester vigilants, en travaillant notamment sur des grandes hauteurs des rezde-chaussée dans le projet urbain. Il faut qu’on laisse de la souplesse aux usages. Les galeries d’art commencent à arriver par exemple. Et puis nous devons avoir présent à l’esprit que la ville va changer. Qu’en sera-t-il par exemple des parkings silos dans une ville sans carbone ? Ils devront pouvoir se transformer le moment venu. Ce sont peut-être les friches de demain.

Nantes métropole

ARCHITECTURE

Conception/Production 1 2 3 4 1 2 3 4

LÉGENDES DES CARTES

Localisation des FILIÈRES CULTURELLES ET CRÉATIVES

93

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

Diffusion

92

Conception/Production 1 2 3 4

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

conception/production

diffusion Nantes métropole

Nantes métropole

LIVRE

LIVRE

Nantes métropole

Nantes métropole

MEUBLE

MEUBLE

Nantes métropole

Nantes métropole

MODE

mode

2

95

3 4

Localisation des FILIÈRES CULTURELLES ET CRÉATIVES

Diffusion

1

94

Conception/Production 1 2 3 4

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

conception/production

conception/production

2 4

Nantes métropole Nantes métropole

Nantes métropole

DESIGN

publicité

Conception/Production 1 2 3 4

Nantes métropole

conception/production/diffusion

Diffusion

1 2 3

Nantes métropole

4

numérique musique, audiovisuel cinéma

Nantes métropole Nantes métropole

photographie produits culturels non reproductibles

97

3

Localisation des FILIÈRES CULTURELLES ET CRÉATIVES

Diffusion

1

96

99

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

À SAINT-NAZAIRE

1

Source : fichier Sirene (INSEE) géolocalisé par l’Addrn

2 3 4

conception/production/diffusion Saint-Nazaire / La Baule

Saint-Nazaire / La Baule

LIVRE

NUMÉRIQUE

Saint-Nazaire / La Baule

Saint-Nazaire / La Baule

MEUBLE

produits CULTURELs non reproductibles

Saint-Nazaire / La Baule

Saint-Nazaire / La Baule

MODE

SERVICES CRÉATIFS

Localisation des FILIÈRES CULTURELLES ET CRÉATIVES

Conception/Production 1 2 3 4

Diffusion

98

100

101

Les Industries Culturelles et Créatives à Nantes / Saint-Nazaire L’Observatoire 2014

CONCLUSION Jean-Luc Charles Directeur de la Samoa Une nouvelle séquence L’Île de Nantes n’est plus, aujourd’hui, une friche industrielle. Ce qui était un pari, un projet, est devenu une réalité, dans ses contours et au-delà. On sent désormais, on voit, tout le potentiel qui se dégage de ce regroupement d’acteurs et de partenaires dans le champ des industries culturelles et créatives. Le Quartier de la création, projet dans le projet urbain, est devenu une tête de réseau, à partir de laquelle se construit un écosystème qui féconde des quartiers émergents, à l’échelle de la métropole et bientôt de la région. Des secteurs sont contaminés, comme le Faubourg, ou sur Prairie au Duc, d’autres centralités émergent, à Chantenay, et plus en aval à Saint-Nazaire… L’aventure urbaine continue et nous entamons une nouvelle séquence. Sur l’île proprement dite, le processus de concentration se renforce, les laboratoires s’installent, l’immobilier dédié aux entreprises créatives se déploie, les écoles, l’Université préparent leur arrivée. Certes, l’esprit pionnier qui a prévalu de 2004 à 2011 est en train de s’estomper au profit de la construction de ce quartier, de ce phénomène de cluster, et nous ne pouvons plus accueillir de manière aussi naturelle et spontanée les candidats à l’installation. Mais nous mettons en place des dispositifs ad hoc ; en témoignent des opérations comme le Karting, ou la programmation d’ateliers d’artistes sur Prairie au Duc, avec notre volonté de donner toute leur place aux jeunes créateurs et aux artistes qui souhaitent participer au mouvement. L’île est en tension de ce point de vue, il nous faut trouver le bon équilibre. Les halles Alstom, où tout est né, seront l’une des clefs du dispositif. Leur aménagement permettra non seulement d’accueillir un essaim de jeunes créateurs autour d’entreprises matures, une plate-forme de recherche et d’innovation, mais aussi d’engager des expérimentations dans de grands volumes dédiés. C’est la leçon que nous avons retenue de l’époque pionnière. Il faut avoir présent à l’esprit qu’il reste quatre-vingt-dix hectares à aménager sur l’Île de Nantes. Un quartier « bien-être et santé » va voir le jour autour du futur CHU, à proximité du Quartier de la création. Nous sommes sur une ville à construire, laboratoire urbain pour laquelle les modèles n’existent pas. C’est un territoire en projet pendant quinze ou vingt ans encore. Un territoire des possibles, et un terrain d’expérimentation pour la ville souhaitable et donc pour les industries créatives et culturelles. Tant qu’il y a cet état d’esprit, et tant qu’il y a ce potentiel, on peut dire que le Quartier de la création a de beaux jours devant lui !

La réalisation de cet ouvrage est une œuvre collective entre la SAMOA, l'AURAN, l'ADDRN. Nous tenons à remercier les structures ayant accompagné l'Observatoire. Parmi lesquelles, l'ensemble des membres du comité de pilotage de l'Observatoire : Jean-Luc Charles, SAMOA Philippe Guillotin, AURAN Claude Maillère, ADDRN Lorraine Bertrand, Saint-Nazaire Agglomération Katia Briand, Nantes Métropole Evelyne Brouard, Pôle emploi Vianney Marzin, Pôle de coopération des acteurs pour les musiques actuelles Philippe Mille, Conseil général Benoît Méchinaud, Chambre de commerce et d'industrie de Nantes Saint-Nazaire Éric Murie, Région Pays de la Loire Dominique Sagot-Duvauroux, Granem

Éditeur : Quartier de la Création, SAMOA Photographies : ©SAMOA - Vincent Jacques, Jean-Dominique Billaud - Martin LAUNAY Dominique MACEL – Guy Toublanc / CARENE Ville de Saint-Nazaire. Remerciements spéciaux à Philippe Dossal, Mathilde Loget, Fabien Le Ruyet, Hélène Maury, Marc Morineau, Hélène Morteau et Lionel Pouget pour la réalisation de cet ouvrage dans une constante bonne humeur malgré des délais parfois contraints. Cet ouvrage a été réalisé avec le concours de la Région Pays de la Loire, de Nantes Métropole, de la Chambre de Commerce et d’industrie de Nantes-Saint-Nazaire et de l’Union Européenne. ISBN en cours Tarif : 22 €

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du Canada sur les enjeux socio-organisationnels de l'économie du savoir, Téluq-UQAM 71p. 2 Andy Pratt (2012) The cultural and creative industries: organisational and spatial challenges to their governance, Die Erdre Vol 143,. no 4,18p. Page 3 of 4. ICC-V4-24032014.pdf. ICC-V4-24032014.pdf. Open. Extract. Open with.

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